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Bourse et Tribunal de Commerce.

Situés place de la Bourse. — 2e arrondissement, quartier Feydeau.

Ce palais ayant été construit sur la plus grande partie de l’emplacement occupé par le couvent des Filles-de-Saint-Thomas-d’Aquin, nous tracerons ici l’origine de cette communauté religieuse. Ces filles, de l’ordre de Saint-Dominique, furent établies à Paris, par Anne de Caumont, épouse de François d’Orléans, comte de Saint-Pol et duc de Fronsac. Cette dame ayant obtenu du cardinal Barberini, légat du pape Urbain VIII, la permission nécessaire, fit venir de Toulouse sept religieuses qui arrivèrent à Paris le 27 novembre 1626. Elles furent installées dans une maison située dans la rue Neuve-Sainte-Geneviève. Cette propriété portait alors le nom d’hôtel du Bon-Air. Ces religieuses y demeurèrent jusqu’en 1632 ; alors elles s’établirent dans la rue Vieille-du-Temple. Cette maison n’étant pas d’une distribution assez commode pour une communauté, elles firent construire un couvent à l’extrémité de la rue Neuve-Saint-Augustin, depuis nommée, dans cette partie, rue des Filles-Saint-Thomas. Ayant pris possession de leur nouvelle maison le 7 mars 1642, jour que l’Église consacre à la célébration de la fête de saint Thomas, ces religieuses se donnèrent le nom de ce saint docteur. L’église, qui ne fut achevée qu’en 1715, n’offrait de curieux que le tombeau de la comtesse de Saint-Pol. Supprimé en 1790, ce couvent devint propriété nationale. Une partie de son emplacement a été cédé par l’État à la ville de Paris pour construire le monument dont nous allons nous occuper. — La Bourse de Paris, si magnifiquement logée aujourd’hui, a été longtemps placée de la manière la plus incommode et la moins convenable. On la mit d’abord dans une partie de l’ancien hôtel Mazarin, où l’on a vu le Trésor Royal ; puis durant la révolution, dans l’église des Petits-Pères ; enfin, pendant la construction de l’édifice actuel, on la relégua dans l’ancien magasin des décors de l’Opéra. Le tribunal de commerce n’était pas logé plus honorablement dans un ancien hôtel derrière l’église Saint-Merri. — Un décret impérial, du 16 mars 1808, ordonna enfin la construction sur l’emplacement de l’ancien couvent des Filles-de-Saint-Thomas, d’un palais destiné à réunir ces deux importants établissements. La première pierre en fut posée le 24 du même mois, et les travaux commencèrent immédiatement. L’architecte Brongniart avait donné les plans de cet édifice et dirigea les travaux jusqu’en 1813, époque de sa mort. Le 8 juin, le convoi funèbre fit une station devant le monument que Brongniart avait commencé ; les ouvriers quittèrent aussitôt leur travail, formèrent la haie ; tous, la tête découverte, rendirent hommage, par leur contenance respectueuse, aux qualités de l’artiste qu’ils avaient perdu. Les constructions étaient alors élevées jusqu’à deux ou trois mètres au-dessus du soubassement. Les travaux de construction, poussés avec activité par M. Labarre, furent ralentis à l’époque de nos désastres. Repris depuis avec une nouvelle activité, surtout à partir de l’année 1821, ils ont été achevés en 1827.

L’installation de la Bourse et du Tribunal de Commerce avait eu lieu dans le monument élevé par MM. Brongniart et Labarre, le 3 novembre 1826.

« Charles, etc. Nous avons proposé, les chambres ont adopté…

LOI.

Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit : — Article unique. Le ministre des finances est autorisée à abandonner en toute propriété, au nom de l’État, à la ville de Paris, l’emplacement occupé par le palais de la Bourse et ses abords, ainsi que les constructions élevées aux frais du gouvernement et les terrains acquis par l’État pour cette destination, ou provenant de l’ancien couvent des Filles-Saint-Thomas, et qui se trouvent en dehors des alignements, soit du palais, soit de la place.

Au moyen de cet abandon, la ville de Paris devra faire terminer à ses frais le palais de la Bourse et ses abords, et demeurera seule chargée de son entretien.

Donné en notre château de Saint-Cloud, le 17e jour de juin, l’an de grâce 1829, et de notre règne le 5e. Signé Charles. »

Cet édifice, situé au centre d’une belle place, plantée et entourée elle-même de magnifiques maisons, occupe un parallélogramme d’environ 71 m. de longueur, sur 49 m. de largeur, ce qui donne une surface de près de 3,005 m. carrés. Sa hauteur est d’environ 19 m. au-dessus du pavé de la place, mesurés au droit des faces extérieures, et de 30 m. mesurés au sommet du comble. L’ordonnance corinthienne qui préside à la décoration extérieure comportait par elle-même de la richesse et de l’élégance, mais l’architecte a eu le bon esprit de les réduire à l’expression la plus simple et la mieux entendue. On regrette de ne pas voir encore sur les piédestaux qui accompagnent les deux perrons, quatre grandes statues allégoriques en marbre.

Une telle construction devait nécessairement entraîner une dépense considérable ; elle a été, indépendamment de la valeur de l’emplacement, dont la presque totalité a été concédée à la ville de Paris par l’État, de 
 8,149,192
dont le gouvernement a payé 
 3,789,386
La ville de Paris 
 2,266,180
et le commerce de Paris, principalement au moyen d’un supplément d’impôt sur les patentes pendant plusieurs années 
 2,093,626.

Somme égale 
 8,149,192.