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avait 97 m. de longueur et 26 m. de largeur. Le chapitre de l’ordre de Saint-Michel se tenait dans une des salles de ce couvent. Dans une autre pièce, qui servait d’école aux jeunes religieux, fut établi au commencement de la révolution, le fameux district des Cordeliers qui balança, pour un temps, le club des Jacobins. Quand les Cordeliers s’élevèrent, les Jacobins étaient déjà puissants par le nombre et l’énergie, aussi leur rivalité fut-elle permanente jusqu’au moment où la métropole étouffa la colonie.

Près du club des Cordeliers, on voyait la demeure du fougueux rédacteur de l’Ami du Peuple. Le 13 juillet 1793, à huit heures du soir, une jeune femme, Charlotte Corday, entrait dans cette maison : elle monte au deuxième étage, et demande à parler à Marat, ayant, disait-elle, d’importants secrets à lui révéler. Elle est introduite ! Restée seule avec Marat, elle raconte ce qu’elle a vu à Caen. — « Quels sont les noms des députés présents dans cette ville, demande aussitôt Marat ? » Charlotte Corday les nomme et lui prenant un crayon, se met à les écrire en disant froidement : — « Ils iront tous à la guillotine ! » — À la guillotine ! répète la jeune fille indignée ; alors tirant un couteau de son sein, elle en frappe ce tribun, qui expire presque aussitôt. Le rapport de la Commune sur les honneurs funèbres rendus à Marat, est un document si curieux, qu’il nous a paru convenable de le reproduire en entier. — Obsèques de Marat. — 16 juillet 1793. « La dépouille mortelle de Marat a été portée en pompe jusque dans la cour des Cordeliers ; mais cette pompe n’avait rien que de simple et de patriotique ; le peuple, rassemblé sous les bannières des sections, les suivait paisiblement et avec un désordre touchant d’où résultait le tableau le plus pittoresque. Il n’est rien arrivé dans la marche du cortège, si ce n’est qu’elle a duré depuis environ six heures du soir jusqu’à minuit. Cette marche était composée des citoyens des sections, des membres de la Convention, de ceux de la Commune, de ceux du département, des électeurs et des sociétés populaires. Arrivé dans le jardin des Cordeliers, le corps de Marat a été déposé sous les arbres dont les feuilles tremblantes réfléchissaient et multipliaient une douce lumière. Le peuple a environné le sarcophage et s’est tenu autour de lui debout en silence et avec respect. Le président de la Convention a d’abord fait un discours éloquent, dans lequel il a annoncé que le temps arriverait bientôt où Marat serait vengé, mais qu’il ne fallait pas par des démarches hâtives et inconsidérées, s’attirer des reproches de la part de nos ennemis ; il a dit que la liberté ne pouvait périr, et que la mort de Marat ne ferait que la consolider au lieu de la détruire. Dufourmy, membre du département, après avoir payé à Marat le tribut de douleur qui lui était dû, après avoir interprété éloquemment les regrets du peuple, a demandé que ses œuvres qui avaient été cause de sa mort, fussent ensevelies avec lui, afin que la postérité pût juger s’il méritait une mort aussi cruelle. Varlet a parlé ensuite. Son discours qui a été couvert des plus vifs applaudissements, a été terminé de la manière la plus heureuse et la moins attendue. Citoyens, dit-il, lorsque Marat, décrété d’accusation, revenait en triomphe aux Jacobins, après avoir couvert de honte ses calomniateurs, à peine entré dans la salle, des enfants lui présentèrent des couronnes. — Elles ne sont faites, dit Marat en les refusant, que pour les morts illustres et qui ont bien mérité de la patrie ! — Citoyens, a repris Varlet, Marat n’est plus ! Marat a bien mérité de la patrie, et je dépose la couronne sur le front de Marat !… — Tous les discours ont été fort applaudis et n’ont été interrompus que par les cris de vive la République !… Le corps de Marat a été enfin déposé dans la fosse, et des larmes ont coulé de tous les yeux. Le chirurgien qui avait embaumé son corps a dit qu’il avait embaumé son cœur à part, et l’avait confié au citoyen Berger. Deux boîtes étaient à côté du corps de Marat, et le chirurgien a ajouté : dans l’une de ces boîtes sont les entrailles de Marat et dans l’autre ses poumons. Il a dit, et la terre a couvert les restes de ce grand homme ! Il a été inhumé à l’endroit même où, rassemblant le peuple autour de lui, il lui lisait les feuilles, et faisait passer dans tous les cœurs le patriotisme qui l’enflammait. — Signé Dorat-Cubières et Bernard. » (Registre 31, fo 61.) — Quelques années après cette cérémonie le corps de Marat fut exhumé, puis jeté dans l’égout de la rue Montmartre.

Il ne reste presque rien aujourd’hui des bâtiments du couvent des Cordeliers. On a utilisé les jardins en y élevant plusieurs pavillons de dissection. Le réfectoire qui était situé en face de la rue Hautefeuille, a été heureusement transformé en un beau musée médical qui porte le nom de Musée Dupuytren. Sur une partie de l’emplacement du cloître, on a établi divers bâtiments : un hôpital où se fait un cours de clinique chirurgicale, un cours de chimie, d’anatomie et de chirurgie. Ces bâtiments ont été réparés et agrandis en 1834. — Une ordonnance royale du 27 septembre 1836, a fixé la moindre largeur de la place de l’École-de-Médecine à 23 m. Les constructions riveraines ne sont pas soumises à retranchement. — Égout. — Conduite d’eau. — Éclairage au gaz (cormpe Parisienne).

Médecine (rue de l’École-de-).

Commence aux rues Racine, no 2, et de la Harpe, no 78 ; finit au carrefour de l’Odéon, no 1, et à la rue de l’Ancienne-Comédie, no 1. Le dernier impair est 43 ; le dernier pair, 38. Sa longueur est de 342 m. — 11e arrondissement, quartier de l’École-de-Médecine.

C’était, en 1300, la rue des Cordèles (Cordeliers). Le couvent de ces religieux était situé dans cette rue. En