estoit de Lorraine et avoit nom Huet, le guette du
palais du roi. Or advint que le dit jour après disner,
ces deux compagnons estant assis sur le siège de la
maison du dit Lappe et parlans de leur besongne,
virent de l’autre part de la voye, une pauvre femme
appelée Fleurie de Chartres, la quelle estoit en une
petite charrette, et n’en bougeoit jour et nuict,
comme entreprise d’une partie de ses membres, et
là, vivoit des aumosnes des bonnes gens. Ces deux,
esmeus de pitié, s’enquirent à qui appartenoit la
place, désirants l’accepter et y bastir quelque petit
hospital. Et après avoir entendu que c’estoit à l’abbesse
de Montmartre, ils l’allèrent trouver ; et pour
le faire court, elle leur quitta le lieu à perpétuité, à
la charge de payer par chacun an cent sols de rente,
et huict livres d’amendement dedans six ans seulement,
et sur ce, leur fit expédier lettres, en octobre,
le dimanche devant la Sainct-Denys 1330. Le lendemain,
les dits Lappe et Huet prindrent possession du
dit lieu, et pour la mémoire et souvenance firent
festin à leurs amis. » — Telle fut l’origine de l’église
et de l’hôpital de Saint-Julien. Quelques ménétriers se
réunirent aux deux fondateurs et firent construire le
petit hôpital, dont la pauvre Fleurie occupa jusqu’à sa
mort le premier lit. Les ménétriers achetèrent ensuite
au prix de douze livres et douze sols de rente par an,
une maison sise au coin de la rue Palée (aujourd’hui du
Maure), et obtinrent la permission de faire bâtir une
chapelle. L’hôpital reçut les noms de Saint-Julien et
Saint-Genest, et la chapelle ajouta à ses titres celui
de Saint-Georges. L’architecture de la petite église de
Saint-Julien devait exciter la curiosité des artistes. Sa
façade pittoresque était d’une délicatesse remarquable.
Elle consistait en une grande arcade accompagnée de
quatre niches. La frise de l’arcade était remplie de petits
anges qui jouaient de plusieurs instruments, alors
en usage, tels que l’orgue, la harpe, le violon, le rebec
à trois cordes, la vielle, la mandoline, le psaltérion,
la musette, le cor, le hautbois, la flûte de Pan, la flûte
à bec, le luth et le tympanon. Dans la niche à gauche
était la statue de saint Julien ; à droite, celle du martyr
saint Genest, comédien à Rome, sous le règne de
Dioclétien. Ce saint, protecteur des musiciens et des
histrions, était coiffé d’une espèce de toque et couvert
d’un simple manteau. Il tenait à la main un violon.
Les ménétriers et les jongleurs demeuraient presque
tous dans la rue qui porta leur nom, et qui se trouve
aujourd’hui confondue dans la rue de Rambuteau.
Réunis en confrérie dès l’année 1331, ils signèrent
au nombre de trente-sept, un règlement qui fut enregistré
au parlement, le 23 novembre de cette année.
Les jongleurs et ménétriers de la corporation
de Paris avaient seuls le droit de se présenter aux
fêtes qui se célébraient dans cette ville. Les ménétriers
étrangers ne pouvaient exercer leur industrie, sous
peine d’être bannis de Paris pendant un an et un jour
et de payer une amende. Cependant, lorsqu’ils ne
faisaient que passer par la ville, ils étaient hébergés aux
frais de l’hôpital fondé par Lappe et Huet. La corporation
des ménétriers était gouvernée par un roi et
par le prévôt de Saint-Julien. Constantin, célèbre violoniste
de la cour de Louis XIII, fut élu roi des musiciens
de Paris. À sa mort, arrivée en 1657, Dumanoir
lui succéda sous le nom de Guillaume Ier ; son fils, Guillaume II, qui le remplaça, abdiqua volontairement en
1685. Le royaume des ménétriers tomba dans l’anarchie
jusqu’en 1741. À cette époque, le célèbre Guignon
monta sur le trône, mais les vapeurs de la royauté
excitèrent son insolent despotisme. Une insurrection
générale força l’imprudent monarque à signer son abdication.
Le titre de roi des musiciens fut supprimé en
1773. Dès l’année 1744, l’archevêque de Paris avait
ordonné aux prêtres de la Doctrine Chrétienne de célébrer
le service divin dans la chapelle de Saint-Julien.
Le 17 décembre 1789, une députation des confrères de
Saint-Julien-des-Ménétriers se présenta à la barre de
l’Assemblée Nationale, et lui fit hommage de leur
église. Ce curieux monument, qui contenait en superficie
148 m., fut vendu le 25 février 1792 et abattu
quelques années après.
Martin (théâtre de la Porte-Saint-).
Il a été bâti, en 1781, sur les dessins de Lenoir, dit le Romain, pour remplacer la salle de l’Opéra qui venait d’être incendiée ; soixante-quinze jours suffirent à l’architecte pour terminer la nouvelle construction. Cette salle fut inaugurée le 27 octobre 1781. Les acteurs de l’Opéra y donnèrent des représentations jusqu’en 1794. À cette époque, ils prirent possession de la salle Montansier, située rue de Richelieu. Le théâtre de la Porte-Saint-Martin fut ouvert le 14 septembre 1808, par le nouveau spectacle des Jeux Gymniques. La direction de ce théâtre, exploitée depuis ce temps par divers particuliers, a subi le sort de toutes les entreprises dramatiques. On y représente aujourd’hui des drames, des comédies-vaudevilles et des ballets. Ce théâtre contient 1,803 places, dont les prix sont ainsi fixés, savoir : avant-scène des 1res, du rez-de-chaussée, des 2mes avec salon, et des 1res loges grillées de face, 5 fr. ; 1res découvertes, 2mes grillées de face et stalles de balcon d’avant-scène, 4 fr. ; stalles d’orchestre et stalles de balcon de face, 3 fr. ; orchestre, baignoires, 1res galeries, loges découvertes (2e rang) et avant-scène des 3mes, 2 fr. 50 c. ; 2mes loges et loges du cintre, 2 fr. ; parterre et amphithéâtre, 1 fr. 50 c. ; 2me galerie, 1 fr. ; 2me amphithéâtre, 50 c.
Martyrs (barrière des).
Elle a d’abord porté le nom de Montmartre. On l’a depuis appelée des Martyrs, en mémoire de saint