prit le nom de ce patron. Ainsi que nous l’apprend
Jaillot, cette maison n’était point une communauté
religieuse. Dans deux arrêts du parlement, le maître
de Saint-Lazare n’est appelé que le prétendu prieur
du soit disant prieuré Saint-Lazare. L’évêque avait
seul le droit de nommer le prieur ou plutôt le chef,
le régisseur de la maison. Le prélat avait en outre la
faculté de le suspendre, de visiter la maison, et d’en
modifier les règlements. L’évêque de Paris, vers 1515,
introduisit les chanoines réguliers de Saint-Victor
dans la maison Saint-Lazare ; l’administration de ces
chanoines ne fut pas, à ce qu’il paraît, exempte de
reproches. Un arrêt du parlement du 9 février 1566,
ordonna que le tiers des revenus de Saint-Lazare serait
employé à la nourriture et entretènement des pauvres
lépreux. Les désordres continuèrent dans la gestion
de cet établissement. En 1632, Adrien Lebon, principal,
offrit sa maison à l’illustre Vincent-de-Paul, instituteur
des prêtres de la Mission ; ces religieux s’installèrent
à Saint-Lazare, en vertu d’un décret d’union
donné par l’archevêque de Paris. Le principal emploi
de cette congrégation était de travailler à l’instruction
des pauvres habitants des campagnes qui n’avaient ni
évêché ni présidial. Dans l’enclos Saint-Lazare, le plus
vaste qu’il y eût dans Paris, se trouvait un bâtiment
appelé le logis du roi. Ordinairement les rois et les
reines s’y rendaient pour recevoir le serment de fidélité
des habitants de Paris avant de faire leur entrée
dans cette ville. Les dépouilles mortelles des rois de
France étaient déposées pendant quelques heures dans
la maison Saint-Lazare, et tous les prélats du royaume
allaient jeter de l’eau bénite sur ces restes que les
caveaux de Saint-Denis devaient renfermer. Vers la fin
du XVIIe siècle, cet établissement tombait en ruines ;
les prêtres de la Mission songèrent à le reconstruire. Ils
firent élever, de 1681 à 1684, les vastes bâtiments
qui existent encore aujourd’hui ; l’église qui avait été
réparée au commencement du XVIIe siècle fut conservée.
— Le 14 juillet 1789, Saint-Lazare fut pillé, incendié
par une troupe de malfaiteurs ; la milice parisienne,
instituée le même jour, vint heureusement arrêter les progrès de la dévastation. En 1793, cet établissement
fut converti en prison, on y renferma plus de douze
cents personnes. Nougaret, qui écrivait pendant la révolution,
nous donne quelques détails sur cette prison.
« Une chose assez comique, dit-il, c’était les écrous. Ici on lisait : Vivian, perruquier, prévenu d’imbécillité
et de peu de civisme (ce malheureux est resté un an au
secret). Dans les derniers temps Hermeau, président
des commissions populaires, venait faire un travail sur
les listes qui lui étaient présentées. C’était Verner qui
était directeur général des interrogatoires qu’on faisait
subir aux prisonniers. On leur demandait : « As-tu
voté pour Raffet ou pour Henrion ? as-tu dit du mal
de Robespierre ou du tribunal révolutionnaire ? combien
as-tu dénoncé de modérés, de nobles, ou de
prêtres dans la section ? » Voilà quel était le cercle
ordinaire des demandes qui, au surplus, ne se faisaient
que pour la forme ; car une fois les listes arrêtées, ceux
qui y étaient signalés avec la croix fatale étaient bien
sûrs d’être égorgés. » — Un des prisonniers qui ont
excité le plus d’intérêt est Roucher, l’auteur des Mois ;
il passait le temps à former la jeunesse d’un de ses
enfants nommé Émile, et cette occupation charmait
les ennuis de sa captivité. Le jour qu’il reçut son acte
d’accusation, il prévit bien le triste sort qui l’attendait ;
il renvoya son fils à qui il donna son portrait pour le
remettre à son épouse. Cet envoi était accompagné du
quatrain suivant adressé à sa femme et à ses enfants :
« Ne vous étonnez pas, objets charmants et doux,
» Si quelqu’air de tristesse obscurcit mon visage ;
» Lorsqu’un savant crayon dessinait cette image,
» On dressait l’échafaud, et je pensais à vous. »
André Chénier fut également enfermé à Saint-Lazare et n’en sortit que pour monter sur l’échafaud.
Cet établissement est aujourd’hui affecté aux femmes prévenues de délits ou de crimes, ainsi qu’aux filles publiques. La population annuelle de cette prison s’élève à huit ou neuf cents. — L’ancienne église Saint-Lazare qui depuis la révolution servait de succursale à la paroisse Saint-Laurent, a été démolie en 1823 ; on a construit ensuite une chapelle et une infirmerie. Dans ces dernières années, cet établissement a été augmenté au moyen de plusieurs acquisitions, entr’autres d’une propriété portant le no 113 sur la rue du Faubourg-Saint-Denis et appartenant aux hospices (voir l’article prison des Jeunes-Détenus) et de terrains provenant du comte Charpentier. Ordinairement la dépense concernant les prisons est acquittée sur les fonds départementaux, mais ces fonds s’étant trouvés insuffisants, la ville de Paris a contribué aux travaux des bâtiments-Saint Lazare pour une somme de 283,199 fr. 18 c.
Lazare (rue Saint-).
Vers 1700, on la nommait rue des Porcherons. Elle était aussi appelée rue d’Argenteuil, parce qu’elle conduisait à ce village. En 1734, cette voie publique n’était encore bordée que de rares constructions. En 1770, elle reçut la dénomination de rue Saint-Lazare, en raison de sa direction vers la maison Saint-Lazare. — Une décision ministérielle du 12 fructidor an V, signée François de Neufchâteau, fixa la moindre largeur de cette voie publique à 10 m. Cette moindre largeur est portée 11 m. en vertu d’une ordonnance royale du 3 août 1838. Le numérotage de la rue