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pas très cultivé. « Messieurs, dit Patru, un ancien Grec avait une lyre admirable, une corde se rompit ; au lieu d’en remettre une de boyau, il en prit une d’argent, et la lyre perdit son harmonie. » L’apologue de Patru fit sensation ; cependant la corde d’argent eut la préférence. — En 1673, l’Académie française vint occuper une des salles du Louvre. Cette salle fut ornée des portraits des académiciens, de ceux de Richelieu, de Pierre Séguier, de Christine de Suède, etc. L’Académie française, après avoir jeté un vif éclat durant le règne de Louis XIV, tomba bientôt dans une obscurité qui dura près d’un demi-siècle. Sa régénération commença lorsqu’elle proposa à l’éloquence des éloges tels que ceux de Descartes, de Fénelon, de Catinat et de l’abbé Suger.

Académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres. — Louis XIV ayant désiré qu’une société de gens de lettres s’occupât du soin de recueillir des médailles et d’inscrire sur les monuments, sur les tapisseries de ses palais, tout ce qui pouvait immortaliser son règne et la gloire de la nation, Colbert choisit parmi les membres de l’Académie française ceux qu’il crut les plus habiles à ce genre de travail. Chapelain, Charles Perrault, l’abbé Cassagne et l’abbé Bourleix, formèrent une réunion à laquelle on donna le nom de Petite Académie. Établie en 1663, elle tint ses séances dans la bibliothèque de Colbert, rue Vivienne. Le nombre des académiciens, d’abord fixé à quatre, fut porté à huit. Un nouveau règlement du 16 mai 1701 fixa le nombre des membres à quarante ; savoir dix honoraires, dix pensionnaires, dix associés et dix élèves. Des lettres-patentes confirmèrent leur organisation. Le nom de Petite Académie, ne pouvant plus convenir, fut changé en celui d’Académie des Sciences et des Médailles, puis en celui d’Académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres. Le premier ouvrage publié par cette académie est l’Histoire de la numismatique sous le règne de Louis XIV. La première édition, qui parut en 1703, comprend 286 médailles. La seconde, imprimée vers 1723, renferme la collection entière des médailles qui ont été frappées pour retracer les événements du règne de ce prince ; elle se compose de 318 médailles. Ces travaux importants ne mirent pas néanmoins les académiciens à l’abri des railleries des écrivains. Piron avait commencé l’attaque, en composant cette épitaphe :

Ci-git un antiquaire opiniâtre et brusque,
Il est esprit et corps dans une cruche étrusque.

Cependant l’on ne saurait oublier les services rendus aux sciences historiques par l’ancienne Académie des Inscriptions, où siégeaient encore au moment où elle fut supprimée, l’abbé Barthélemy, Bréquigny, la Porte-Dutheil, Choiseul-Gouffier, de Laverdy, de Paulmy, Bailly, D. Poirier, D. Clément, Dacier, Sylvestre de Sacy.

Académie des Sciences. — Après avoir établi l’Académie des Inscriptions, Colbert, qui savait deviner les grandes idées de Louis XIV, chercha les moyens de donner de nouveaux développements aux sciences. Pour atteindre son but, ce grand ministre se fit faire un rapport sur tous les savants qui s’assemblaient chez M. de Montmort, conseiller d’État, puis demanda Huyghens, Duclos, Bourdelin, Delachambre, Auzout et plusieurs autres, et leur proposa de les réunir en un corps sous la dénomination d’Académie des Sciences, en leur disant qu’ils féconderaient par l’association des travaux que l’isolement devait toujours paralyser. Cette Académie devait s’occuper de cinq sciences principales : des mathématiques, de l’astronomie, de la botanique, de la chimie et de l’anatomie. On proposa de joindre à ces sciences celle de la théologie ; les observations de la Sorbonne firent repousser cette proposition. L’Académie des Sciences occupa d’abord une des salles basses de la bibliothèque du roi. Jusqu’en 1699, cette société ne subsista qu’en vertu d’une simple autorisation du roi. À cette époque, elle reçut une existence légale, et on lui donna un appartement au Louvre. Ces avantages furent confirmés par lettres-patentes de février 1713. L’Académie des Sciences comptait à cette époque parmi ses membres, Fontenelle, Tournefort, Mallebranche, Ozanam, Réaumur et plusieurs autres savants distingués. Elle s’était associé Boërhaave, Leibnitz, Maupertuis et les hommes les plus illustres de l’Europe. Dans les dernières années de son existence, son illustration ne s’était point affaiblie ; on citait parmi ses membres, Lalande, Daubenton, Portal, de Jussieu, Darcet, Buffon, Cassini, Monge, Berthollet, Fourcroy, Haüy, etc.

Académie royale de Peinture et de Sculpture. — Il fallait un complément aux corps savants et littéraires. Colbert voulut élever les arts au même rang. Une querelle survenue entre les peintres de cette époque fournit au ministre l’occasion de féconder sa pensée. Ces artistes étaient alors divisés en deux classes. On désignait ceux qui faisaient partie de la première par le nom de maîtres. Ceux de la seconde étaient appelés peintres sans maîtrise ou privilégiés. Lebrun, à la tête des peintres privilégiés, était parvenu, par la protection du chancelier Séguier, à former une société qu’il fit autoriser par un arrêt du conseil privé et confirmer par lettres-patentes. On avait accordé à ces artistes la galerie du collége de France. Colbert, qui venait de créer une école de peinture et de sculpture à Rome pour former des élèves entretenus par le roi, réunit bientôt cette dernière à la compagnie de Lebrun et fonda ainsi l’Académie royale de Peinture et de Sculpture qui occupa six grandes pièces du Louvre. Il lui adjoignit l’ancienne académie de Saint-Luc, et cette réunion éteignit l’ancienne querelle. L’Académie royale de Peinture et de Sculpture se maintint sans éprouver de changement jusqu’à l’époque de la révolution.

Académie royale d’Architecture. — Projetée en 1671 par Colbert, cette Académie se forma avec une simple autorisation jusqu’au mois de février 1717, époque où elle reçut une existence légale. L’Académie royale