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la fin du XIIe siècle, de deux maisons dans Paris, avec cette condition qu’on fournirait, au jour de son anniversaire, aux pauvres malades, tous les mets qu’ils pourraient désirer. Philippe-Auguste est le premier de nos rois qui ait fait quelques libéralités à l’Hôtel-Dieu. Dans une de ses lettres on lit : « Nous donnons à la maison de Dieu de Paris, située devant l’église de la bienheureuse Marie, pour les pauvres qui s’y trouvent, toute la paille de notre chambre et de notre maison de Paris, chaque fois que nous partirons de celle ville pour aller coucher ailleurs. » — Par un acte capitulaire de l’église de Paris, l’évêque Maurique et son chapitre arrêtèrent d’un commun accord, qu’au décès de l’évêque ou d’un chanoine, leur lit appartiendrait à l’Hôtel-Dieu. Mais l’accroissement de la population rendit bientôt insuffisant le service de cet hôpital. En 1217, le doyen Étienne, conjointement avec le chapitre, chargea par un statut quatre prêtres et quatre clercs des soins spirituels. Trente prêtres et vingt-cinq sœurs, également laïcs, durent pourvoir aux besoins des malades. On exigea d’eux la chasteté, et ils furent soumis à une loi disciplinaire sous la surveillance du chapitre et du maître de la maison de Dieu, titre qu’on donnait au membre qui avait la direction de l’établissement. Saint Louis est regardé à juste titre comme le bienfaiteur de cet hôpital qui, d’après son désir, prit le nom d’Hôtel Notre-Dame ou de la bienheureuse Vierge Marie. Par ses ordres, il fut exempté des droits d’entrée et de toutes impositions, et les bâtiments qu’il augmenta atteignirent le Petit-Pont. En 1531, les administrateurs de l’Hôtel-Dieu achetèrent une maison située sur le Petit-Pont, joignant le nouveau portail. Sur l’emplacement de cette maison qui avait appartenu à la Sainte-Chapelle, le cardinal Antoine Duprat, légat en France, fit bâtir la salle qu’on nommait avant la révolution, salle du Légat. En 1606, Henri IV fit reconstruire la salle Saint-Thomas. La même année la salle Saint-Charles, qui donna son nom à un nouveau pont dont les piliers avaient été bâtis sous ce règne, fut achevée par les libéralités de Pomponne de Bellièvre. En 1634 on termina un autre pont qui fut nommé Pont-au-Double. Ainsi cet établissement s’agrandissait à mesure que les maux se multipliaient, et la charité croissait à l’égal des douleurs.

Louis XIV voulut aussi favoriser les développements de cet hôpital. — « Don à l’Hôtel-Dieu du Petit-Châtelet (novembre 1684). — Louis, etc… Ayant reconnu par nous-même, il y a quelques années, que l’Hôtel-Dieu de notre bonne ville de Paris n’avait point assez d’étendue pour contenir commodément le grand nombre des pauvres malades qu’on y amène tous les jours, lesquels y sont reçus et traités jusques à leur entière convalescence, de quelque pays, nation et religion qu’ils soient, par le bon ordre et l’économie qu’entretiennent dans cette maison les personnes qui en règlent l’administration ; nous aurions dès lors pensé chercher les moyens de procurer l’augmentation des bâtiments du dit Hôtel-Dieu, et ayant jugé que rien n’était plus avantageux pour exécuter cette charitable entreprise que de faire don au dit Hôtel-Dieu du Petit-Châtelet de notre dite ville de Paris. À ces causes désirant, à l’imitation des rois nos prédécesseurs, donner au dit Hôtel-Dieu des marques de notre protection et munificence royale, en confirmant notre brevet du 18 septembre de la même année, ci-attaché sous le contr’scel de notre chancellerie, nous avons par ces présentes, signées de notre main, accordé et fait don au dit Hôtel-Dieu du Petit-Châtelet de notre dite ville, appartenances et dépendances, pour y être construits tels bâtiments que les administrateurs d’icelui aviseront pour la commodité des pauvres malades ; voulons et nous plaît que le dit Hôtel-Dieu jouisse pleinement, paisiblement et perpétuellement du dit Petit-Châtelet, etc… Donné à Versailles, au mois de novembre, l’an de grâce 1684, et de notre règne le 42e. Signé Louis. » (Archives du royaume, section administrative, série E, no  3,370.) — En 1737 et 1772, deux incendies causèrent de grands ravages à l’Hôtel-Dieu ; le dernier surtout entraîna la mort d’un grand nombre de malades. Vers cette époque, l’encombrement était devenu si grand à l’Hôtel-Dieu, qu’on avait été forcé de faire coucher huit malades dans le même lit, et presque toujours, le lendemain, trois ou quatre avaient cessé de vivre. L’Hôtel-Dieu qui ressemblait à un vaste tombeau, était une cause permanente d’infection pour la Cité.

On résolut à cette époque de supprimer cet établissement et de transporter les malades, partie à l’hôpital Saint-Louis, partie à la maison dite de Santé.

Des lettres-patentes furent rendues à cet effet au mois de mai de l’année 1773. De vives réclamations s’élevèrent contre ce déplacement. Il était à craindre que les blessés, les malades des quartiers du centre, transportés au loin, ne mourussent pendant le trajet. Ces considérations firent abandonner ce projet, et un système d’administration plus juste et plus en rapport avec les besoins des malades fut pratiqué dans cet ancien établissement.

Jusqu’à l’époque de la révolution, l’histoire de cet hôpital ne nous fournit aucun fait qui mérite d’être rapporté.

Mais au commencement de la Terreur, on ordonna la fermeture de nos églises, et tout ce qui rappelait la foi de nos pères fut proscrit.

« Séance du duodi, de la 3e décade de brumaire an II. — Le procureur de la commune requiert que l’on change dans les hôpitaux les noms des salles des malades, et que l’Hôtel-Dieu soit appelé Maison de l’Humanité. Arrêté et envoyé aux travaux publics pour l’exécution. Signé Lubin, vice-président ; Dorat-Cubières, secrétaire. » Le 1er vendémiaire an XII, le ministre de l’intérieur posa la première pierre du portique de l’Hôtel-Dieu, qui fut élevé sur les dessins et sous la direction de M. Clavareau,