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tenaire, vint en prendre possession. Vers 1809 des travaux considérables de restauration et d’embellissement y furent faits sous la conduite du sieur Poyet, architecte. Il fallut encore en 1818 étayer et reprendre plusieurs parties du bâtiment qui fléchissaient. Ce palais, dont l’architecture n’offrait rien de remarquable, était accompagné d’un beau jardin dessiné et planté par Gabriel Thouiri. — Le 14 février 1831, le curé de Saint-Germain-l’Auxerrois célébra un service funèbre en commémoration de la mort du duc de Berri. Le buste de ce prince fut promené dans l’église. Cette manifestation, aussi imprudente que coupable, servit de prétexte à quelques agitateurs pour se livrer aux excès les plus révoltants. La croix qui surmontait l’édifice est renversée, l’église dévastée de fond en comble ; quand l’émeute n’a plus de belles sculptures à mutiler, de tableaux à déchirer, elle se porte en foule au palais archiépiscopal, en hurlant : « Mort à l’archevêque ! » Elle recommence alors les mêmes profanations : les statues, les meubles, les livres sont jetés dans le fleuve. Les appartements dépouillés, elle s’en prend aux pierres ; la démolition commence avec un ensemble, un sang-froid extraordinaires. M. de Quélen fut sauvé par un savant illustre.

Une année après cet odieux attentat, un fléau épouvantable, le choléra, décimait la population parisienne. Aussitôt l’archevêque reparaît, non pour demander justice des hommes qui ont dévasté, pillé, détruit son palais ; il ne vient pas se venger de ceux qui ont voulu l’assassiner, il vient pour soulager et bénir. C’est à l’Hôtel-Dieu qu’on voit M. de Quélen au milieu des morts et des mourants entassés par la contagion. Il n’est pas encore satisfait des secours abondants que la charité chrétienne lui donne à distribuer, il abandonne son traitement ; il veut que sa maison de Conflans devienne une maison de convalescents, et que le séminaire de Saint-Sulpice soit transformé en infirmerie. On le voit transporter des cholériques dans ses bras ! L’un d’eux qu’il bénissait lui dit : « Éloignez-vous de moi, je suis un des pillards de l’archevêché. — Mon frère, répond l’archevêque, c’est une raison de plus de me réconcilier avec vous et de vous réconcilier avec Dieu !… » — L’emplacement occupé par l’ancien manoir des archevêques de Paris, a été cédé gratuitement par l’État à la ville de Paris par la loi du 8 juin 1837, à la charge par ladite ville d’y établir une promenade. Cet embellissement est en voie d’exécution.


Archives du royaume.

Situées dans les rues de Paradis et du Chaume, no 12. — 7e arrondissement, quartier du Mont-de-Piété.

1re Partie. — Hôtel de Soubise. — L’emplacement occupé aujourd’hui par les Archives du royaume, réunissait dans son enceinte plusieurs hôtels, souvent mentionnés dans l’histoire de Paris. Au coin de la rue des Quatre-Fils et de celle du Chaume, se trouvait une vaste propriété appelée le grand chantier du Temple. — Le connétable de Clisson fit construire sur cet emplacement un hôtel qui, après sa mort, fut possédé par le comte de Penthièvre. Ce gentilhomme étant demeuré fidèle à Charles VII, les Anglais, devenus maîtres de Paris, confisquèrent tous ses biens, et louèrent l’hôtel de la rue des Quatre-Fils dix livres parisis. À partir de l’époque de cette confiscation, l’histoire se tait pendant plus d’un siècle. Cette propriété appartenait en 1552 au sieur Rabon de la Bourdaisière qui, par contrat du 15 juin 1553, la vendit moyennant 16 000 livres, à Anne d’Est, épouse de François de Lorraine, duc de Guise, qui la donna le 27 octobre 1556 au cardinal de Lorraine. Celui-ci la céda le 4 novembre suivant à Henri de Lorraine, prince de Joinville, son neveu.

L’ambitieuse maison de Guise ne pouvait se contenter du modeste manoir de Clisson.

Du côté de la rue de Paradis s’élevait l’hôtel des rois de Navarre de la maison d’Évreux. Il devint la propriété du duc de Nemours comte d’Armagnac. Convaincu du crime de haute trahison, ce seigneur eut la tête tranchée, et l’on confisqua tous ses biens. Cet hôtel passa alors au comte de Laval, qui le vendit en 1545 au sieur Brinon, conseiller au parlement de Paris. Il fut ensuite acquis par Charles de Lorraine. Ce cardinal en fit cession le 11 juin 1556 à François, son frère. En 1557, le même cardinal acquit de Louis Doulcet la moitié d’une maison aboutissant à la rue des Quatre-Fils, et côtoyant l’ancien hôtel de Clisson. En 1561, il fit l’acquisition dé l’autre moitié. François de Lorraine avait acheté, le 15 juin 1560, l’hôtel de la Roche-Guyon, qui appartenait alors, à Louis de Rohan, comte de Montbazon. Cette propriété se trouvait dans la rue Vieille-du-Temple, en face de celle Barbette ; elle communiquait à la maison de Guise. Les princes lorrains ayant réuni tous ces bâtiments à la propriété de Louis Doulcet, composèrent une vaste habitation d’où le chef de cette orgueilleuse famille dictait ses volontés au faible Henri III. — Le fameux duc de Guise était là pendant les barricades. — Le principal corps de logis qui s’étend depuis la rue du Chaume jusqu’à l’endroit où commençait l’ancien jardin, et dont la façade régnait le long du passage qui conduisait à la rue Vieille-du-Temple, avait été construit par Henri, duc de Guise sur les dessins de Lemaire, célèbre architecte du temps. Nicolo décora la chapelle des peintures à fresque qu’on y voyait encore avant la révolution. Les Guise firent aussi construire la rampe en fer et l’escalier par lequel on montait dans les appartements donnant sur la rue du Chaume ; les croix de Lorraine qui en forment un des ornements, ne laissent aucun doute à cet égard. Les bâtiments qui sont à l’angle de la rue du Chaume et de celle des Quatre-Fils, ont été construits aussi par les princes de cette maison. En 1697, François de Rohan, prince de Soubise, acheta cette propriété des héritiers de la duchesse de Guise. Il prit dès lors le nom d’hôtel de Soubise qu’il conserva jusqu’à nos jours. Le prince chercha à donner un ensemble régulier aux divers bâti-