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furent mis en liberté. Bellecour, au nom de tous ses camarades, fit à la Comédie Française un discours rempli d’excuses humiliantes et déplora le malheur d’avoir manqué au public.

En 1780, le ministre Necker engagea Louis XVI à supprimer les prisons du For-l’Évêque et du petit Châtelet. Une ordonnance du roi, du 30 août de la même année, porte que les prisonniers seront transférés dans l’hôtel de la Force, dont le vaste emplacement promettait plus de salubrité aux détenus et facilitait les moyens d’établir entr’eux des séparations et distinctions nécessaires.


Gervais (église Saint-).

Située rue Jacques-de-Brosse. — 9e arrondissement, quartier de l’Hôtel-de-Ville.

Dès le VIe siècle, une église existait en cet endroit. Fortunat, qui a écrit la vie de saint Germain, nous apprend que le pieux évêque venait quelquefois faire sa prière dans cette église, appelée Basilica sanctorum Gervasii et Protasii.

On ignore à quelle époque elle fut érigée en paroisse. Après cette érection, elle obtint sans doute le droit d’avoir une chapelle située dans l’enceinte de Paris.

Au XIe siècle, l’église Saint-Gervais appartenait aux comtes de Meulan, qui en firent don au prieuré de Saint-Nicaise. La charte de donation énonce les églises de Saint-Gervais et de Saint-Jean situées in vico qui dicitur Greva.

Les revenus de l’autel appartenaient à plusieurs personnes, et nous lisons que l’archidiacre Guillaume en donna la troisième partie qu’il possédait au chapitre Notre-Dame. Le pouillé parisien du XIIIe siècle nous apprend que la cure de Saint-Gervais était à la nomination du prieur de Saint-Nicaise de Meulan. Cette basilique, qui avait été sans doute dévastée par les Normands, fut réparée et dura jusqu’au temps du roi Robert. L’édifice qui la remplaça fut commencé vers 1212 et terminé en 1420. L’inscription suivante, gravée sur une pierre scellée dans le mur à gauche, rappelle la date de la dédicace.

« Bonnes gens, plaise vous sçavoir que cette présente église de messeigneurs saint Gervais et saint Protais, fut dédiée le dimanche devant la fête de saint Simon saint Jude, l’an 1420, par le révérend père en Dieu, maître Gombault, évêque d’Agrence, et sera à toujours la fête de l’annualité de dédicace, le dimanche devant la dite fête saint Simon saint Jude, s’il vous plaît y venir y recommander vos maux, et prier pour les bienfaiteurs de cette église, et aussi pour les trépassés. Pater Noster, Ave Maria. »

L’ensemble des constructions de l’église Saint-Gervais a toute la délicatesse qui caractérise l’architecture du XVe siècle ; cependant quelques parties semblent appartenir à une époque postérieure.

Le portail de Saint-Gervais, ouvrage de Jacques de Brosse, est remarquable par sa belle ordonnance. La première pierre en fut posée par Louis XIII, le 24 juillet 1616. Il est composé de trois ordres, disposés suivant l’usage observé par les anciens architectes, c’est-à-dire l’ordre ionique sur le dorique, et le corinthien sur l’ionique. Les deux premiers ordres sont de huit colonnes chacun et le dernier de quatre. Les colonnes de l’ordre dorique sont engagées d’un tiers dans le vif du bâtiment et unies jusqu’à la troisième partie de leur fût, mais le reste est cannelé à côtes. Les colonnes des autres ordres sont isolées. — Le tableau du maître-autel représente les noces de Cana ; on ignore le nom du peintre. Les statues de saint Gervais et de saint Protais, placées à droite et à gauche, sont de Bourdin, et les anges, de Guérin. Le crucifix qu’on voit sur la porte du chœur, et au pied duquel sont agenouillés la Vierge et saint Jean, est une œuvre pleine de mérite. Le Christ est de Sarrazin et les deux autres figures de Buiret. Jean Cousin a peint les vitraux du chœur. Ils représentent le martyre de saint Laurent, la samaritaine, le paralytique. Ces vitraux ont été détruits en partie.

Aux deux extrémités de la balustrade qui sépare le chœur de la nef, on voit deux petits tableaux représentant, l’un saint Louis de Gonzague en prières, l’autre saint Gervais et saint Protais apparaissant à saint Ambroise.

Plusieurs chapelles règnent au pourtour des bas-côtés ; celle de Saint-Michel se distingue par ses vitraux qui représentent des danses de bergers. Ces peintures, dues à Pinaigrier, sont aussi remarquables par la composition que par la vivacité du coloris.

La chapelle de la Vierge placée au fond de l’édifice est sans contredit le morceau d’architecture du style le plus gracieux. La voûte est ornée d’une couronne de pierre en clef pendante. Cet ouvrage, d’une hardiesse surprenante, passe pour le chef-d’œuvre des frères Jacquets. Cette chapelle est maintenant en réparation ; les travaux, exécutés par M. Baltard, seront terminés vers la fin de l’année 1844.

La chapelle de Sainte-Barbe est décorée de vitraux qui représentent une procession, dans laquelle on remarque François Ier, dont la figure est très ressemblante.

Dans une chapelle à gauche est un tableau d’Albert Durer, peint en 1500. Il représente les principales scènes de la Passion de Jésus-Christ. En face de la nef de droite, et dans la chapelle du Saint-Esprit, est un concert d’anges par le Pérugin.

Dans la chapelle Saint-Eutrope est le mausolée du cardinal Le Tellier qui expira, disait l’inscription, à l’âge de 83 ans, le 30 octobre 1685, huit jours après qu’il eût scellé la révocation de l’édit de Nantes, content d’avoir vu consommer ce grand ouvrage. Le chancelier est représenté à demi-couché ; un Génie en pleurs est à ses pieds ; les figures de la Prudence et de la Justice sont sur l’archivolte ; la Religion et la Force sur les