Page:Lazare - Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments, 1844.djvu/218

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


sortirions des limites que nous nous sommes tracées, en analysant ici tant de productions remarquables.

D’illustres personnages ont leurs monuments funèbres dans cette église ou y furent inhumés. Nous devons citer : Anne-Hilarion de Cotentin, comte de Tourville, vice-amiral et maréchal de France, mort en 1701, à l’âge de 59 ans.

Dans le mur de la façade intérieure à droite, on voit le tombeau et le buste de Chevert. Son épitaphe, composée par d’Alembert, mérite d’être rapportée : — « Ci-gît François Chevert, commandeur, grand’croix de l’ordre de Saint-Louis, chevalier de l’Aigle-Blanc de Pologne, gouverneur de Givet et de Charlemont, lieutenant-général des armées du roi.

Sans aïeux, sans fortune, sans appui, orphelin dès l’enfance, il entra au service à l’âge de onze ans ; il s’éleva malgré l’envie, à force de mérite, et chaque grade fut le prix d’une action d’éclat. Le seul titre de maréchal de France a manqué, non pas à sa gloire, mais à l’exemple de ceux qui le prendront pour modèle. — Il était né à Verdun-sur-Meuse, le 2 février 1699. Il mourut à Paris, le 24 janvier 1769. »

Un autre monument plus somptueux, et qui porte aussi le nom d’un grand homme, décore la chapelle de la Vierge. C’est le mausolée de Colbert, exécuté par Baptiste Tuby et Antoine Coysevox, sur les dessins de Lebrun. — En face de la tombe du grand ministre, on voyait un petit monument bien simple ; c’était celui de Marin Cureau de La Chambre, médecin ordinaire de Louis XIV. Les traits du savant docteur étaient reproduits dans un médaillon que portait le génie de l’immortalité. On lisait dans un cartouche cette inscription :

Spes illorum immortalitate plena est.

et plus bas :

Marinus de La Chambre, obiit 1669, ætatis 75.

Le roi consultait toujours son médecin sur le choix de ses ministres. Il existait entre Louis XIV et Cureau de La Chambre une correspondance secrète sur cet objet. On y lisait cette phrase du docteur : « Si je meurs avant sa majesté, elle court grand risque de faire à l’avenir de mauvais choix. »

Saint-Eustache compte plusieurs curés célèbres parmi lesquels on cite le fameux René Benoit, que ses paroissiens appelaient le pape des halles ; le savant jurisconsulte Cosme Guymier et Jean Balue, parent du cardinal de ce nom.

L’attachement des habitants de cette paroisse pour leurs pasteurs était si grand, qu’il était souvent impossible de les changer de cure. L’histoire nous fournit un exemple de cette tendresse. Vers le milieu du XVIIe siècle, le curé de Saint-Eustache, appelé Merlin, tomba malade et mourut. L’archevêque de Paris nomma bientôt un successeur, qui vint pour prendre possession de sa cure. Le neveu de Merlin, simple prêtre, crut devoir s’y opposer, et donna pour raison que cette cure lui appartenait en vertu d’une résignation que son oncle lui avait faite.

Cet argument n’était pas des meilleurs ; cependant fortifié par la bienveillance des dames de la halle, comptant sur l’appui des paroissiens, le neveu de Merlin persista. Bientôt toute la population du quartier s’assemble en tumulte pour le protéger, met en fuite les soldats, puis installe le neveu de l’ancien curé.

Ce désordre dura trois jours. Enfin, les dames de la halle envoyèrent une députation à la reine.

L’orateur en jupons, après avoir expliqué les causes de l’émeute, résuma ainsi son discours : « Le bon curé Merlin a reconnu son neveu pour successeur ; d’ailleurs, les Merlin ont toujours été curés de Saint-Eustache, de père en fils, et les paroissiens n’en souffriront pas d’autres. »

La reine ne put leur promettre une entière satisfaction. Alors l’émeute devint sérieuse. Déjà les bourgeois commençaient à barricader les rues, lorsqu’on apprit que l’archevêque venait de céder.

Merlin remplaça son oncle et le calme se rétablit. Le lendemain, quelques plaisants firent placarder sur l’église une affiche ainsi conçue :

AVIS.
La cure de Saint-Eustache est à la nomination des dames de la halle.


Eustache (impasse Saint-).

Située dans la rue Montmartre entre les nos 1 et 3. Pas de numéro. Sa longueur est de 37 m. — 3e arrondissement, quartier Saint-Eustache.

Elle a été formée vers 1642 et doit son nom à l’église Saint-Eustache. Sa largeur actuelle est de 5 m. Il n’existe pas d’alignement pour cette impasse.


Eustache (place de la Pointe-Saint-).

Commence à la rue de la Tonnellerie, nos 79 et 81 ; finit aux rues Traînée, no  1 et Montorgueil, no  8. Le dernier impair est 15 ; le dernier pair, 6. Sa longueur est de 48 m. — Les numéros impairs sont du 3e arrondissement, quartier Saint-Eustache. Les pairs du 5e arrondissement, quartier Montorgueil.

Son nom lui vient du clocher de l’église Saint-Eustache qui est bâti en pointe ou pyramide. Le poète Guillot, en 1300, parle ainsi de ce carrefour :

Ving à la pointe Saint-Huitasse
Droit et avant sui ma trace.

Cette place a été élargie en vertu de lettres-patentes du mois de juillet 1779. — Une décision ministérielle du 23 brumaire an VIII, signée Quinette, a fixé la moindre largeur de cette voie publique à 22 m. Les maisons, nos 2, 4 et 6 sont alignées. Celles du côté opposé sont soumises à un fort retranchement. — Égout. — Conduite d’eau. — Éclairage au gaz (compe Française).