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LE MOYEN ÂGE.

Mais la notation n’était pas la seule difficulté de la lecture musicale au moyen âge ; on en trouvait une autre dans la constitution même des tons, qui a duré presque jusqu’au siècle dernier et qui n’a pas peu contribué à rendre compliquée l’étude de notre art. Si peu musicien que l’on soit, chacun sait que notre gamme se compose de sept notes ; en réalité, la gamme du moyen âge, elle aussi, en avait sept ; mais six seulement étaient nommées, comme nous l’avons vu, en parlant de Guy d’Arezzo. Exposer tout au long cette théorie, qui tient cependant tant de place dans l’histoire de la musique, conviendrait peu à cet abrégé, dans lequel nous voulons éviter autant que possible ce qui pourrait paraître trop technique à nos lecteurs ; aussi bien nous nous contenterons de signaler, en passant, l’existence du système de solfège compliqué, connu sous le nom de Système des muances. Il fut échafaudé à cette seule fin d’éviter le triton ou quarte juste, qui était pour les musiciens du moyen âge l’abomination de l’abomination, le Diabolus in musica, et qui fait aujourd’hui partie de notre langue musicale courante[1].

Malgré les difficultés de la notation et du solfège, il est facile de se rendre compte de l’état de la musique aux XIIe et xiiie siècles. À partir de cette époque, les monuments abondent ; les manuscrits sont remplis de chansons avec musique, sans compter les livres de chants religieux. Pour n’en citer que quelques-uns,

  1. On trouvera des détails sur la notation proportionnelle et sur le Système des muances dans la Musique au siècle de saint Louis. (iie vol. des Motets français, publiés par Gaston Raynaud et H. Lavoix fils.)