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« Libertés et franchises », voilà pour un chapitre un nom très noble. C’est si bon, des libertés, et si beau, des franchises et le pouvoir de dire de temps en temps : « Non ! » Et certes nous manquons aujourd’hui de maintes libertés et franchises. Mais voyons quelles libertés et franchises célèbre M. Brentano ; des provinces s’opposent à la construction du canal de Languedoc ; elles ne permettent pas l’établissement de douanes à la frontière de France, — mais elles maintiennent tant qu’elles peuvent les douanes intérieures et elles interdisent la libre circulation des grains dans le royaume ; — de la ville de Saint-Malo, Richelieu obtient avec peine la permission de construire dans son port les galères dont il a besoin pour sa guerre contre l’Angleterre ; — les parlements acceptent, modifient ou rejettent les ordonnances, chacun comme il l’entend ; — la noblesse sert aux armées comme il lui plaît : « Sert qui veut », dit M. Brentano ; en effet, l’an 1635, au moment où l’on est aux prises avec l’ennemi et même envahi par lui, huit ou neuf cents « chevaux de noblesse » désertent malgré « harangues, promesses, flatteries et menaces » ; la Bourgogne et la Franche-Comté refusent, en vertu de leurs libertés, de recevoir dans leurs villes les garnisons du roi ; aussi,