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LES GAIETÉS DU CONSERVATOIRE

tout près d’une porte, se tenait frémissant Bartholomeo, son violon à la main, ce violon chéri qu’il voulait associer à son triomphe, car il était devenu une partie de lui-même.

La salle était houleuse ; la délibération paraissait longue ; plusieurs fois déjà on avait poussé de ces ah ! ah ! de ces chut ! mystérieux, provoqués par des fumistes, et qui semblent annoncer le retour du jury.

Enfin, il revient, ce jury ; le silence se fait, on attend et on écoute :

Du haut de la loge présidentielle, M. Auber, d’une voix calme et placide, envoie cet ordre à l’huissier de service :

« Appelez M. Lamoureux. »

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

C’en était fait du premier prix !… Bartholomeo, d’un mouvement nerveux du quatrième doigt, casse sa chanterelle ; toutefois, il reste immobile, mais il pâlit, de l’affreuse pâleur spéciale aux nègres, qu’il faut avoir vue pour la comprendre.

M. Auber reprend, du même ton indifférent :

« Appelez MM. Martin, Bagdanoff et Accursi. »

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Il n’avait pas le deuxième prix !… Il fait sauter le la de son violon.

A la proclamation du premier accessit, M. Gros, ce fut le qui subit le même sort ; mais le malheureux Barthol, dont l’amour-propre excessif avait en quelque sorte fondu pendant