appellerons… Troublot, si vous voulez, et qui était bien la plus sale petite crapule qu’on puisse imaginer.
Ce n’était déjà plus un petit garçon ; ce n’était pas encore tout à fait un jeune homme ; il était arrivé à cet âge indécis où les chiens commencent à lever la patte.
Insolent, querelleur, paresseux, mauvais camarade, menteur, chapardeur, pourvu certainement d’autres défauts que je n’ai pas eu l’occasion d’observer, et peut-être même de vices, il était notamment l’inventeur du truc du double-carnet, que je vais essayer de vous raconter, pour vous faire apprécier les brillantes capacités du jeune homme.
Voici en quoi cela consistait :
Un jour où par hasard j’avais vu le père Troublot (je dis par hasard, car jamais les parents ne se manifestaient), j’avais organisé, de concert avec lui, un carnet à deux colonnes, sur lequel le père devait inscrire :
- 1o L’heure à laquelle Troublot quittait la maison paternelle ;
- 2o L’heure à laquelle il y rentrait ;
- 3o Le temps consacré au travail entre deux classes.
Moi de mon côté, je devais y noter :
- 1o L’heure à laquelle il arrivait à la classe ;
- 2o L’heure à laquelle il en partait ;
- 3o Mon appréciation sur le travail effectué et la tenue en classe.
Le résultat, selon ma naïve conception, devait être quelque chose comme ceci :
En cas de bonne conduite, cas fort peu présumable :
COTÉ DU PÈRE
Parti à 8 h. 1/2 Rentré à 11 h. 1/2 A travaillé 4 heures. |
MON COTÉ
Arrivé à 9 h. Parti à 11 h. Travail satisfaisant. |