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signification. Ensuite il pourra se représenter modifié à l’infini, soit comme rythme, soit dans les détails de son contour mélodique ou dans son harmonisation, soit dans son instrumentation, morcelé, dénaturé, anobli ou ridi- culisé, par augmentation, par diminution, renversé[1], il restera toujours reconnaissable et fera naître chez l’auditeur, même passif, un état dame analogue à celui qui a accompagné sa première apparition.

Là est sa force ; en quelques notes, il évoque tout un ensemble d’idées, et cela sans plus d’effort pour l’auditeur que si on faisait passer devant ses yeux une image connue. C’est un portrait musical, mais souvent de convention et de pure imagination.

En effet les Leit-motifs ayant caractère imitatif et descriptif sont en minorité ; j’en citerai pourtant quelques-uns qui sont de véritables onomatopées musicales ; le ricanement nerveux de Kundry, le galop des chevaux dans la Chevauchée, les mugissements du Dragon, les bruits de la Forge, et peut-être par-dessus tout l’ondulation des flots au début de l’Or du Rhin ; ceux-ci s’adressent directement à l’oreille. Ce sont des images sonores.

D’autres appellent puissamment à l’esprit, par leur caractère même, l’idée de la chose qu’ils veulent représenter : le Walhalla est grandiose, solennel ; l’Épée étincelle, le Feu pétille ; le motif de la Cène, dans Parsifal, s’épand comme un immense signe de croix… Là encore il est difficile de s’y tromper. On pourrait en citer beaucoup d’autres aussi typiques, notamment dans les Maîtres Chanteurs.

Mais ce n’est pas là un caractère indispensable au Leit-motif, dont la forme est, au contraire, dans la plupart des

  1. Procédés de contrepoint.