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père vont occuper les places d’honneur sur l’estrade ; Kothner plante bien en vue la bannière des Maîtres Chanteurs, et les apprentis invitent l’assemblée au silence.

Sachs alors s’avance pour parler à la foule ; mais le peuple, à la vue de son poète aimé, celui qui sait si bien chanter ses souffrances et ses espérances, fait retentir de nouveau des exclamations enthousiastes et, avec une touchante spontanéité, entonne un beau chant que Hans a composé jadis et qui est dans toutes les mémoires comme dans tous les cœurs. Sachs, qui pendant tout le temps est resté perdu dans une lointaine rêverie, abaisse, ému, ses regards sur ses compatriotes et les remercie de leur accueil. Puis, s’adressant aux Maîtres, il leur rappelle combien est élevé le but du Concours qui va s’ouvrir et comme est précieux le Prix réservé au vainqueur. Il demande que tout poète ait le droit de se présenter librement et sans conditions, pouvu qu’il puisse justifier de son passé sans tache, qui sera une sûre garantie de bonheur pour l’adorable enfant qui constituera une si haute récompense. Pogner remercie en termes chaleureux l’ami qui a bien voulu se faire l’exact interprète de ses sentiments, puis Sachs désigne, pour subir le premier l’épreuve, Beckmesser, qui depuis un long moment déjà s’efforce en cachette d’apprendre par cœur la poésie dérobée chez le cordonnier, et, n’y parvenant pas, s’essuie le front en donnant les marques du plus comique désespoir.

Il quitte l’estrade des Maîtres et se hisse tant bien que mal sur le tertre couvert de gazon qui doit servir de chaire aux concurrents, aidé malicieusement par les Apprentis, qui se moquent de lui, le bousculent et le font trébucher, en riant sous cape. Le peuple, voyant paraître ce disgracieux personnage, exprime son étonnement et plaisante à voix basse, tandis que le candidat,