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rendue dès l’enfance le jouet favori de la reine et des princesses. Vive et pleine d’agréments, elle faisait le charme des compagnies les plus élégantes, et, sauf deux années passées à la Visitation, tout son temps s’était écoulé dans les fêtes. On l’avait surnommée la petite Fée, et rien ne résistait à ses grâces fantasques. Sa mère ne lui avait jamais rien refusé, et son frère, le comte Henri, plus âgé qu’elle de vingt ans, avait pour sa jolie sœur toutes les faiblesses d’un père. Diane ne craignait au monde que sa belle-sœur, la comtesse Marguerite, parfaitement bonne pour elle, mais qui réprimait quelquefois ses étourderies, et, depuis la mort de la comtesse douairière, prenait tous les jours plus d’empire sur le cœur de son mari et le gouvernement intérieur de la famille.

Les projets de départ de la comtesse furent annoncés à Diane, et la consternèrent. Elle courut trouver son frère, et le pria, le supplia de la laisser à Saint-Germain, chez quelqu’une des amies de sa mère. Pour la première fois de sa vie, elle essuya un refus. Elle pleura et s’écria :

« Vous voulez donc m’enterrer toute vive dans votre affreux château de Lussault ? »

Mais le comte Henri fut inflexible et lui assura, du reste, que Lussault était un charmant séjour, et qu’une saison passée au bord de la Loire dans le plus joli pays du monde, avec toutes les aises de la vie et en compagnie de sa belle-sœur et de ses neveux, ne pouvait être considérée comme un enterrement.

Le comte fit ses adieux, et Diane, qui aimait beaucoup son frère, pleura, gémit, et jeta les hauts cris, si bien que sa belle-sœur ne put s’empêcher de lui dire :

« Vous oubliez, ma sœur, que vous êtes une Boisbriand, et que la devise de votre maison est : Patior, taceo (je souffre, je me tais). »

La comtesse dit adieu à son mari sans verser une seule larme, et le pria de bénir ses enfants.

« Allez, Monsieur, lui dit-elle, oubliez femme et enfants, et ne songez qu’à bien servir le roi. »

Mais, dès qu’il fut parti, elle tomba évanouie, et fut pendant plusieurs heures entre la vie et la mort.