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ce pèlerin avec lui. Quant à Hugo de Ganneville, il devra revenir au camp et rendre compte à la reine de sa conduite discourtoise et déloyale. M’approuvez-vous, Madame ?

– Oui, beau fils, dit la reine ; vous avez parlé avec prudence. Je me charge, moi, de récompenser ce jeune pèlerin, si dévoué à son seigneur. Plût à Dieu que les grands vassaux de la couronne fussent semblables à ce paysan ! Que désires-tu, mon enfant ? Que puis-je faire pour toi ?

– Madame, dit Pierre, je ne désire qu’une chose au monde, et elle m’est promise. À la Saint-Michel, j’entrerai comme frère lai au monastère de Saint-Sauveur-le-Vicomte, et je servirai Dieu seul. La seule récompense que je souhaite, bien que je sois loin de la mériter, c’est d’avoir l’honneur de baiser la main de notre bien-aimé roi, et la vôtre, Madame. Ce sera pour moi comme un acompte du paradis, si j’obtiens cette grâce.

– Un chevalier n’eût pas mieux dit, n’est-ce pas, Louis ? » dit la reine en souriant, et elle tendit sa belle main à Pierre agenouillé.

Le jeune roi fit de même, et Pierre, se relevant, allait s’éloigner, lorsqu’un jeune page, accourant hors d’haleine en agitant son chaperon, cria de loin :

« Donnez-moi des gants, Sire ; donnez-moi des gants, Madame ! j’apporte une bonne nouvelle !

– Voici mes gants, dit le jeune roi ; mais dis donc vite la nouvelle, Anjorrant !

– N’entendez-vous pas les trompettes et les acclamations ? dit le page ; on bat la chamade depuis une demi-heure. Le vicomte de Bellesme est au camp, apportant les clefs du château. Il se rend à discrétion. Vive le roi ! Venez vite, Madame ! Quel bonheur ! nous allons bientôt revoir les tours de Notre-Dame !

– Que Dieu soit béni, dit la reine en joignant les mains ; la reddition de Bellesme épargnera bien du sang, et nous assure la paix de ce côté de la Loire. Avant de nous quitter, mon père, vous nous chanterez le Te Deum.

Et Blanche de Castille et saint Louis, suivis du bienheureux Thomas Hélie, reprirent le chemin du camp.