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– Vous ferez bien, dit Alain ; notre pauvre demoiselle est dans un état bien inquiétant. Ce brigand de Hugo lui a dit que messire Guillaume était mort. Je suis sûr que ce n’est pas vrai, et qu’il mentait comme un chien qu’il est ; mais notre pauvre demoiselle l’a cru, et elle est folle de douleur.

– Je pars tout de suite, dit Colette ; voici mes fils qui reviennent. »

Elle leur recommanda de bien garder la maison, et sans autre escorte que son chien de garde Faraud, vigoureux mâtin qui avait étranglé plus d’un loup, elle prit le chemin du château du connétable, situé à trois quarts de lieue du Val, dans cette belle forêt de chênes, abattus au siècle dernier, dont nous voyons encore les souches énormes, semblables à des rochers, se couvrir de rejetons à chaque printemps, et soutenir les terres le long des chemins creux de la fertile vallée de Brix.

Pendant ce temps Hugo se hâtait de procéder à l’œuvre de destruction. Il avait effrontément menti en disant que la reine l’avait chargé de détruire immédiatement le château. Sa mission, qu’il avait du reste sollicitée, ne consistait qu’à s’assurer du départ du baron de Brix, à mettre une petite garnison dans le château et à y attendre des ordres. Hugo, perdu de dettes, et ne souhaitant que de passer en Angleterre pour échapper à ses créanciers, n’avait vu là qu’une occasion de pillage et de vengeance. Il détestait Adam de Brix, qui, plus d’une fois, l’avait dénoncé à l’Échiquier comme donnant asile dans son château de Ganneville à tous les braconniers, vagabonds et coupe-jarrets du pays, les protégeant et les aidant à molester voyageurs et villageois. Enfin, il y a de cela plusieurs années, le château de Ganneville avait été démoli comme repaire de brigands, par l’ordre du roi Richard. Hugo s’était alors attaché au service de Jean sans Terre, en rébellion contre son frère Richard, puis il l’avait quitté pour passer dans les rangs de l’armée du roi de France, et, bien que peu estimé, il était parvenu à gagner les bonnes grâces du roi Louis VIII par son activité et sa hardiesse dans les occasions. La reine