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mais Hugo, non moins prompt, et encore jeune et vigoureux, fit un bond de côté, évita le coup qui devait lui fendre la tête, et, se jetant sur le vieillard, lui saisit le poignet et le désarma.

À la vue de son épée enlevée par Hugo, Adam de Brix resta immobile un instant ; puis il chancela. Luce s’élança pour le soutenir ; mais il tomba, l’entraînant dans sa chute, comme le chêne foudroyé tombe entouré du faible lierre qui s’était suspendu à ses branches. Marie se hâta de secourir le vieillard, et Luce, couvrant son visage de baisers et de larmes, le suppliait en vain de parler. Il cessa bientôt de respirer, et Hugo de Ganneville, consterné un instant, donna l’ordre de porter sur le lit seigneurial le corps inanimé du baron de Brix.

Tandis que ses hommes d’armes s’acquittaient en silence de cette funèbre besogne, et que Luce et Marie les suivaient en pleurant, on vint avertir Hugo qu’Alain et les moines de Brix, ne sachant rien de ce qui s’était passé, demandaient à entrer au château.

Hugo se rendit sur les créneaux. Le crépuscule permettait à peine de distinguer les objets. Alain cependant le reconnut et fit une exclamation de désespoir.

« Le diable d’enfer est donc déchaîné ? s’écria-t-il. Est-ce vous que je vois, messire Hugo ?

– Oui, dit Hugo ; je suis maître du château. Votre baron va en sortir avec sa fille et les femmes et les enfants de ses vassaux. Je prends possession de la forteresse au nom du roi de France.

– Messire Hugo, dit dom Benoît, vous jouez gros jeu : je vous en avertis. La reine n’aime pas qu’on outrepasse ses ordres.

– Dites vos patenôtres, sire moine, et préparez-vous à chanter les vêpres des morts.

– Les vêpres des morts ? s’écria Alain, et pour qui ? grand Dieu !

– Vous le verrez bien ! » dit Hugo en quittant les créneaux.

Les religieux et l’écuyer attendaient avec angoisse. La nuit était venue, et ils voyaient des lumières aller et venir