Page:Lavergne - Fleurs de France, 1924.djvu/16

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Guillaume du Hommet. Je le reconnaîtrais entre mille : personne ne monte à cheval aussi bien que lui. Ah ! quand il aura cinq ans de plus, ce sera un fier homme de guerre.

— Et un bon et loyal seigneur, dit Jouvine ; c’est le meilleur cœur du monde ; si doux, si pitoyable aux pauvres gens, si pieux à l’église, si adroit et si gai à la chasse et partout ! Et, avec cela, beau comme un archange, ce qui ne gâte rien. »

Luce s’était rapprochée de son aïeul, tout en arrosant les lis en fleur, et ses yeux, suivant la direction de ceux de Jouvine et du vieux baron, n’hésitèrent pas à reconnaître le cavalier qui s’avançait dans la vallée au grand trot de son coursier noir. Elle devint toute vermeille et s’écria :

« Voici messire Guillaume. Nous verrons s’il m’apporte les roses qu’il m’a promises.

— Et que voulez-vous faire de ces roses, ma fille ? dit le vieillard.

— De beaux chapels pour nous parer demain, mes amies et moi, et des bouquets pour orner la table. Je préparerai tout cela pour ce soir, et on mettra les fleurs à la cave pour les tenir fraîches jusqu’à demain matin. Dès le lever du soleil, Guyonne et ses enfants iront couper force joncs, marjolaines, genêts et serpolets pour joncher la salle du festin, et ils ont déjà fait les guirlandes de lierre et les couronnes qu’on suspendra autour de la grande salle.

— Fort bien, reprit le baron, mais nos chasseurs ne sont pas des jeunes filles, et toutes ces fleurs ne les contenteront pas. Ayez-vous bien songé aux provisions, ma fille ? C’est la première fois que je vous confie le soin d’ordonner une fête. Il faut que celle de demain vous fasse honneur.

— Soyez tranquille, Monseigneur, tout est prévu : maman Colette a déjà apporté au château des agneaux gras, des poulets et des pigeons en quantité. Le bœuf est tué, le chevreuil aussi ; la marée arrivera cette nuit de Cherbourg, et dès le matin on cueillera les fraises et les cerises. Le cuisinier fait déjà ses tartes. Si vous voulez bien venir avec moi sur le balcon de la cuisine, Monseigneur, vous verrez quel réjouissant coup d’œil elle présente. Nous aurons un beau paon tout emplumé, des pâtés d’anguilles, des cha-