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âgé que ma belle-fille. Tout nous fait espérer qu’elle sera heureuse.

– Assurément, Madame, elle le sera. Faut-il la faire appeler ?

– Je vous en prie, ma mère. »

Bientôt après Madeleine d’Algueville entrait au parloir et vint embrasser sa belle-mère. Elle avait les yeux fort rouges, et sa robe noire et son petit voile lui eussent donné l’air d’une novice, si elle n’eût été affublée des paniers et des souliers à talons hauts dont la mode commençait à se passer. En dépit de tout cela elle était fort jolie, bien faite, et ne paraissait pas avoir plus de quinze ans. Mme d’Algueville la caressa, lui fit présent d’une belle montre ornée de perles fines et d’un portrait de M. d’Algueville, et lui demanda si elle n’était pas bien contente de revenir à la maison.

« Oh ! oui, Madame ; oui, maman, dit-elle ; mais j’aime bien ces dames et mes compagnes, et... je ne les verrai plus ! »

Elle fondit en larmes à ces mots. La supérieure et Mme d’Algueville la consolaient doucement.

« Chère enfant, lui dit sa belle-mère, dites-moi ce qui pourrait vous faire plaisir. Vous l’aurez, je veux vous voir contente.

– Je voudrais... je voudrais emporter quelque chose d’ici, dit en sanglotant la pensionnaire.

– Et quoi, ma fille ? Vos compagnes vous ont donné des images ; les religieuses aussi. Vous avez cueilli les fleurs et récolté les graines de votre petit jardin. Que voulez-vous de plus ?

– Je voudrais emporter quelque chose de vivant, ma révérende mère. Je vous en prie, donnez-moi Minou-Minette !

– Oh ! bien volontiers, ma chère enfant. »

La supérieure appela une sœur converse, et, quelques minutes après, la jeune fille montait en carrosse avec sa belle-mère, emportant dans ses bras une toute petite chatte blanche, la plus jolie du monde, et qui, depuis un mois ou deux, était le jouet favori des pensionnaires du couvent.

Minou-Minette s’acclimata parfaitement en Normandie.