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– Volontiers ! trinquons d’abord ! »

Et l’If, écartant ses branches, montra sa tête, soigneusement couverte d’un demi-masque vert et d’un bonnet de même couleur.

« Es-tu domino ou dominette ? dit-il.

– Ni l’un ni l’autre, je suis un diablotin. En veux-tu la preuve ? Je vais te dire ton nom.

– Je t’en défie. »

Le domino bleu se haussa sur la pointe du pied et dit à l’oreille de l’If :

« Tu es le marquis de Malignac, cousin de l’intendante, et tu cours le monde cherchant une héritière pour redorer ton blason et payer tes dettes. »

L’If tressaillit, mais répondit avec aplomb :

« Ceux qui t’ont dit cela ont menti. Où sont-ils que je les châtie comme il faut ? Si tu as le malheur de répéter cette bourde, domino bleu, je te jetterai par la fenêtre.

– Tout doux, dit le domino, je n’en dirai rien, parole de masque. Sache bien, Verdure, que je te veux du bien. Je puis te rendre service ; Malignac ou non, tu cherches femme. Moi, diable bleu, je connais toutes celles de Strasbourg ; interroge-moi sur leurs défauts, sur leurs dots, sur leurs qualités, tu sauras tout. »

Quelques danseurs altérés arrivaient au buffet.

« Viens avec moi, domino, dit l’If, je veux profiter de ta science. »

Et, prenant la main du clerc déguisé, l’if l’entraîna dans le grand salon. Une banquette élevée, placée dans l’embrasure d’une croisée, se trouvait libre. Ils s’y placèrent, tandis que s’organisait une polonaise, danse grave et à laquelle tous les invités, à peu d’exceptions près, devaient prendre part.

Les plus belles et les plus riches demoiselles de Strasbourg défilèrent au son de la musique devant l’if et son malicieux compagnon ; elles furent toutes drapées de la belle façon. Quand le fripon de clerc ne savait rien, il inventait.

Vint le tour de Técla et d’Itha. Les deux sœurs se suivaient ; conduites par deux bergers assez gauches.

« Celles-là sont d’assez bonnes filles, assez riches, assez