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quatre-vingt-quinze francs. Il ne songea pas à calculer la perte qu’il subissait par le fait de cette vente précipitée. Jamais pareilles sommes n’avaient été à sa disposition et, dans la joie de sa dignité reconquise, il n’était pas loin de s’imaginer qu’il serait maintenant presque riche et que tous les tracas d’avenir étaient bel et bien conjurés. De nouveau, il se reprenait à espérer un sort tranquille.

Pourtant, lorsque toutes les dépenses et les dettes anciennes furent acquittées, les bijoux retirés du mont-de-piété, les vêtements et chaussures renouvelés, c’est à peine s’il lui resta un peu plus d’une centaine de francs. Il est vrai que Jean avait profité d’une occasion avantageuse pour acheter une chèvre, facile à nourrir puisque Paul était assez grand pour la conduire chaque jour paître les fossés herbeux de la route, à proximité de l’école. Le jeudi, ils iraient tous emmi les bois où la chèvre trouverait pâture abondante et parfumée. Les bessonnes se délecteraient à boire son lait chaud et crémeux. En un mot, comme disait Jean, l’argent qu’elle avait coûté ne serait qu’une précieuse avance.

Mais voici que dans sa préoccupation, Coste avait oublié de rembourser les cinquante francs dus, depuis le déménagement, à son collègue de Peyras. Il advint que celui-ci le lui rappela dans une lettre quasi insolente où, entre autres aménités, il lui disait ceci : « Qu’il aurait cru trouver dans un collègue plus de respect de la parole donnée, etc., etc. »

Le matin où pareille lettre lui fut remise, Jean en parut très vexé. Son front s’assombrit ; il eut envie, en envoyant l’argent, de répondre très sèchement ; mais il n’en fit rien, craintif que son collègue, piqué au vif, ne parlât de sa dette, à Peyras. Par amour-propre, il se contenta d’envoyer un mandat-poste avec même un mot d’excuse.

Louise n’en revenait pas de voir filer si vite cet argent qu’elle avait cru inépuisable. Comme Jean, plein d’assurance et d’insouciance, prétendait qu’il fallait garder