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conscience qui les montre et qui les saisit ne peut être elle-même ni montrée ni saisie ? S’il faut dire qu’elle se cache, c’est comme la lumière dans laquelle nous voyons tous les objets plutôt que nous ne la voyons elle-même. Mais si elle ne se détache pas de nous pour que nous puissions la contempler comme un spectacle, c’est parce qu’elle est ce spectateur qui est nous-même. Et ce nous-même, c’est le seul point du monde où l’être et le connaître, au lieu de s’opposer, coïncident : telle est la raison pour laquelle l’expérience que chacun a de son propre moi est si émouvante ; ce n’est point seulement parce que ces mots moi et mien intéressent un fragment d’être avec lequel je me confonds, c’est parce qu’en me confondant avec lui, je pénètre pour mon compte dans l’absolu même de l’être. Alors tout le reste n’est plus pour moi que phénomène.

Non point aussitôt toutefois, comme on le pense presque toujours. Car penser, pour moi, c’est poser d’autres êtres comparables à moi, pourvus comme moi d’initiative et de con-