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Édouard Le Roy et de prononcer le nom même de la chaire dans laquelle il a maintenu pendant vingt-six ans la tradition du spiritualisme français, sans évoquer la mémoire d’Henri Bergson qui s’est éteint au début de cette année après la carrière la plus glorieuse, dont les cours autrefois attiraient notre jeunesse par cette sorte de secret spirituel qu’ils laissaient pressentir et que nous n’achevions jamais de convertir en doctrine, dont les livres n’ont cessé d’être relus par plusieurs générations depuis un demi-siècle sans que personne puisse être sûr d’en avoir pénétré l’essence la plus subtile. Nul philosophe n’a paru d’abord plus aisé, plus éloigné de toute technicité, plus plein de grâce et d’enveloppement : mais nul aussi n’est peut-être plus difficile, plus insaisissable, plus plein de détours et de lointains. Nul n’a exercé une influence plus étendue ni plus profonde : on oserait à peine dire qu’il a eu un véritable disciple. Et pourtant, on ne saurait contester qu’il y ait une sorte de révolution bergsonienne, comme il y a eu une révolution cartésienne et qu’elle lui soit sem-