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de donner ces deux enseignements à la fois : mais la rigueur même à laquelle une telle science l’avait accoutumé l’obligeait à s’interroger sur le fondement de cette satisfaction qu’elle donnait à son esprit dans le domaine qui était le sien, et qui demeurait pourtant sans contact avec ses aspirations les plus profondes et les plus essentielles. De là la sympathie qu’il devait marquer de bonne heure pour une pensée qui faisait de l’intellect un instrument destiné, comme il l’était peut-être déjà pour Descartes, à régler notre action sur les choses et à nous en rendre maître, mais qui cherchait à surprendre au fond de notre conscience dans la pure intuition que nous avons de la vie une sorte de genèse spirituelle de nous-même et de tout le réel. Tandis que l’analyse ne cesse de découper la réalité en objets et en concepts séparés qui sont toujours en rapport avec nos besoins, l’intuition, changeant la direction de notre regard, retrouve à sa source même la continuité de l’élan qui anime notre propre vie et qui la dépasse, mais qu’elle cherche toujours à accueillir et à promouvoir. Que l’on ne