Page:Lavalley - Légendes normandes, 1867.djvu/86

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— J’en aurais pitié si tu avais un mari assez lâche pour manquer à son devoir.

— Pourquoi tenter l’impossible ? Les Anglais arriveront avant toi.

— Je connais mieux le pays qu’eux ; et je compte bien prendre le chemin le plus court.

— Et si tu les rencontres en route ?

— J’ai mon fusil ; il avertira nos artilleurs.

— Tu te feras tuer, voilà tout ! Les Anglais se vengeront sur toi de leur échec… Oh ! je n’aurais pas dû te réveiller !

Madeleine se lamentait, suppliait. Cabieu continuait ses préparatifs et répondait aux objections de sa femme par des plaisanteries dites avec fermeté, ou par des mots sérieux prononcés en souriant. En même temps il réfléchissait et combinait son plan. Tout à coup il éclata de rire. Une idée étrange venait de surgir dans son esprit. Il entra dans un cabinet et reparut avec un tambour, qu’il jeta sur son épaule.

— Si la farce réussit, dit-il en mettant sa carabine sous son bras, on n’aura jamais joué un si joli tour à nos amis les Anglais !

Il se pencha sur le berceau et embrassa l’enfant qui dormait. Quand il se releva, ses yeux étaient humides. Madeleine s’aperçut de son