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compatriotes. Depuis qu’il est naturalisé Français, il aime les Anglais autant que nous.

— Peux-tu plaisanter dans un pareil moment, Michel ! dit la femme du sergent.

En même temps elle battait le briquet. Une gerbe d’étincelles brilla dans l’ombre.

— N’allume pas la lampe ! dit vivement le garde-côte ; tu nous ferais massacrer. Si les Anglais s’aperçoivent que nous veillons, ils entoureront la maison et nous égorgeront sans brûler une amorce.

— Que faire ? dit la femme avec désespoir.

— Nous taire, écouter et observer.

— Le chien va nous trahir.

— Je me charge de museler M. Pitt.

À ces mots, le sergent entre-bailla la porte et attira le dogue dans la maison ; puis il alla se mettre en observation derrière la haie de son jardin.

La mère était restée auprès du berceau. L’enfant dormait paisiblement et rêvait sans doute aux jeux qu’il allait reprendre à son réveil. Il ne se doutait pas du danger qui le menaçait. Il songeait encore moins aux angoisses de celle qui veillait à ses côtés, prête à sacrifier sa vie pour le défendre.