Page:Lavalley - Légendes normandes, 1867.djvu/79

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Voici le fait dans toute sa grandeur, dans toute sa simplicité.

À cette époque, Michel Cabieu, sergent garde-côte, habitait une petite maison située à l’extrémité nord d’Ouistreham. Dans son isolement, cette maison ressemblait à une sentinelle avancée qui aurait eu pour consigne de préserver le village de toute surprise nocturne. Ses fenêtres s’ouvraient sur les dunes et sur la mer. En plein jour, pas un homme ne passait sur le sable, pas une voile ne se montrait à l’horizon, sans qu’on les aperçût de l’intérieur de la chaumière.

Mais l’ennemi avait bien choisi son temps. La nuit était profonde. Il n’y avait plus de lumières dans le village. Les Anglais laissèrent quelques hommes pour garder les barques et se divisèrent en deux troupes, dont l’une se dirigea vers Colleville, tandis que l’autre se disposa à remonter les bords de la rivière d’Orne.

Ce soir-là, Michel Cabieu s’était couché de bonne heure. Il dormait de ce lourd sommeil que connaissent seuls les soldats préposés à la garde des côtes et obligés de passer deux nuits sur trois. À ses côtés, sa femme luttait contre le sommeil. Elle savait son enfant souffrant et