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mentalement leurs chiffres et faisaient leur charitable problème, des rues voisines, la foule se répandait à flots tumultueux sur la place où se dresse le portail de la cathédrale. On ne savait pas au juste à quelle heure la représentation devait commencer. Mais l’important était de ne pas manquer de place ; et chacun s’était muni de tout ce qu’il faut pour tromper les ennuis de l’attente ou satisfaire l’aiguillon de la faim.

Tout à coup une grande rumeur se fit dans la multitude. Toutes les têtes se dressèrent, et chacun se haussa sur la pointe des pieds pour voir le héros de la fête. Mais la curiosité publique fut trompée. Au lieu de l’audacieux gymnaste qu’on attendait, on n’aperçut qu’un petit vieillard qui se débattait entre deux soldats.

— Je veux lui parler ! disait-il avec des larmes dans les yeux. Au nom du ciel, laissez-moi lui parler !

— Il n’est plus temps ! répondit l’un des soldats.

— Lâchez-moi ! disait le vieillard en essayant de prendre la fuite. Il me reconnaîtra bien moi… il ne refusera pas de me voir !

Malgré ses prières, les deux soldats l’entraînèrent, le conduisirent contre une des maisons de la place et l’y gardèrent à vue.