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préférence pour vous, ni vous sourire, non ! Germain, je ne devais pas vous aimer, parce que vous étiez mon maître ! Malheur à moi ! car vous êtes riche et vos parents voudront vous marier à une riche fermière. Et vous aurez beau dire que vous m’aimez, on ne vous écoutera pas ; et vous aurez beau chercher à me retenir près de vous, moi je vous fuirai, parce que si je cédais à vos instances, on m’accuserait de vous avoir aimé pour votre fortune. Vous-même, vous le croiriez peut-être plus tard… O ma mère ! Si j’avais eu ma mère près de moi, si elle avait existé seulement ! L’idée de me représenter devant elle après ma faute me l’eût fait éviter… car elle m’avait élevée honnêtement, et je n’étais pas née mauvaise. Mais Dieu me l’a enlevée trop tôt, et le souvenir des morts n’est pas assez puissant pour nous arrêter… O ma mère ! ma mère ! que n’étiez-vous-là !

Germain était profondément ému. Il s’approcha de la jeune fille, prit une de ses mains dans les siennes et lui dit avec une rude franchise :

— Élisabeth, regardez-moi bien… Je vous aime et vous pouvez compter sur moi !

Les deux jeunes gens tombèrent dans les bras l’un de l’autre.