Page:Lavalley - Légendes normandes, 1867.djvu/230

Cette page n’a pas encore été corrigée

les grands arbres, dont les feuilles bruissaient comme de petites vagues qui viennent mourir au rivage ; un doux bourdonnement d’insectes s’échappait des haies voisines ; la terre était brûlante, l’air était rempli de vagues murmures, tout invitait au sommeil, et la pauvre fille ne tarda pas à s’endormir sous la voûte d’azur.

Qui pourra déterminer l’instant de raison où commence le sommeil, où finit la veille ? Qui pourra dire ce qui distingue le rêve de la rêverie ? s’ils sont séparés par un abîme, ou s’ils sont unis étroitement ?… Élisabeth s’était reportée par la pensée aux jours de son enfance ; on l’interrompt dans sa rêverie, elle dit adieu au monde des songes, elle marche, elle agit, elle fait sa tâche journalière, puis elle se repose ; et, sitôt que le sommeil a fermé ses yeux, la voilà de nouveau dans la maison de son père. Le temps a bruni le chaume que, tout enfant, elle avait vu prendre à la première moisson dont elle eût gardé le souvenir. Sa mère ne file plus près du foyer demi-éteint, dont elle remuait les cendres pour préparer le repas du soir. C’est Élisabeth qui remplit la petite chambre de son mouvement, c’est elle qui nettoie l’aire, c’est elle qui ranime le feu mourant, c’est elle qui va