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arbres, se laissa tomber près du banc de gazon sur lequel il s’était assis le jour même avec Marie et s’abandonna à tout l’excès de sa douleur, s’exagérant, comme tous les malheureux, la portée du coup qui venait de le frapper. Il se releva soudain, tout pale, tout défait, et ne sortit du bois que pour commencer à travers champs une course insensée. Le désespoir, la colère, les mille passions qui l’agitaient avaient surexcité ses forces, au point qu’il semblait rire des obstacles et franchissait d’un pied sûr les fossés les plus larges et les haies les plus élevées. Après avoir couru ainsi pendant plus d’une heure, il fut tout surpris de se retrouver à l’entrée de Bretteville. Alors seulement il pensa à sa mère. Mais il craignit de l’effrayer en se présentant subitement devant elle, et cette crainte allait sans doute lui faire rebrousser chemin, lorsque l’idée lui vint qu’elle était peut-être endormie. Cet espoir le décida à rentrer pour prendre du repos ; car il se sentait à bout de forces et de courage. Il s’approcha donc de la maison et prêta l’oreille ; tout était silencieux. Il poussa doucement la porte ; la lampe brûlait encore, et sa mère, agenouillée dans un coin de la chambre, priait pour lui. Magdeleine l’avait entendu ; elle