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ressources du métier et savait remplacer, par la pratique et l’expérience, ce qui lui manquait en théorie ou en largeur de vues. Il se mit ardemment à l’ouvrage, ne songeant guère à travailler pour la gloire de Dieu, mais désirant frapper l’esprit de ses nouveaux concitoyens et agrandir sa renommée. Son nom était gravé sur sa porte avec cette orgueilleuse inscription : vir non incertus, l’homme illustre ! empruntée à Gilabertus, architecte de Toulouse.

La tour s’élevait, s’élevait à vue d’œil et commençait à dominer tout le village. Chaque habitant pouvait apercevoir, de ses fenêtres ou de son jardin, les manœuvres des ouvriers suspendus aux échafaudages. La plupart, n’osant porter un jugement sur ce qu’ils étaient incapables de comprendre, se contentaient d’admirer sur la foi de la renommée de Pierre Vardouin. Le maître de l’œuvre ne trouvait pas partout la même indulgence. Les esprits forts de l’endroit, — ces gens qui aiment à critiquer en raison directe de leur ignorance, — parlaient déjà librement sur son travail à mesure qu’il approchait de sa fin. On n’aimait pas la forme des gargouilles, qui vomissaient l’eau du sommet du corps carré ; la flèche ne s’annonçait pas bien,