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personne ne sera témoin de mon départ. À parler avec franchise, que ne ferais-je pas pour vous, dont l’inexplicable attachement a su promptement se révéler à mes yeux éblouis, surtout étonnés d’une telle preuve de bonté, à laquelle je me suis assuré que je ne me serais pas attendu. Puisque je ne vous connaissais pas. Maintenant je vous connais. N’oubliez pas la promesse que vous m’avez faite de vous promener sur le pont du Carrousel. Dans le cas que j’y passe, j’ai une certitude, à nulle autre pareille, de vous y rencontrer et de vous toucher la main, pourvu que cette innocente manifestation d’un adolescent qui, hier encore, s’inclinait devant l’autel de la pudeur, ne doive pas vous offenser par sa respectueuse familiarité. Or, la familiarité n’est-elle pas avouable dans le cas d’une forte et ardente intimité, lorsque la perdition est sérieuse et convaincue ? Et quel mal y aurait-il après tout, je vous le demande à vous-même, à ce que je vous dise adieu tout en passant, lorsque après-demain, qu’il pleuve ou non, cinq heures auront sonné ? Vous apprécierez vous-même, gentleman, le tact avec lequel j’ai conçu ma lettre ; car, je ne me permets pas dans une feuille volante, apte à s’égarer, de vous en dire davantage. Votre adresse au bas de la page est un rébus. Il m’a fallu près d’un quart-d’heure pour la déchiffrer. Je crois que vous avez bien fait d’en tracer les mots d’une manière microscopique. Je me dispense de signer et en cela je vous