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que le produit soit quatre ! Quelques-uns soupçonnent que j’aime l’humanité comme si j’étais sa propre mère, et que je l’eusse portée, neuf mois, dans mes flancs parfumés ; c’est pourquoi, je ne repasse plus dans la vallée où s’élèvent les deux unités du multiplicande !


Une potence s’élevait sur le sol ; à un mètre de celui-ci, était suspendu par les cheveux un homme, dont les bras étaient attachés par derrière. Ses jambes avaient été laissées libres, pour accroître ses tortures, et lui faire désirer davantage n’importe quoi de contraire à l’enlacement de ses bras. La peau du front était tellement tendue par le poids de la pendaison, que son visage, condamné par la circonstance à l’absence de l’expression naturelle, ressemblait à la concrétion pierreuse d’un stalagtite. Depuis trois jours, il subissait ce supplice. Il s’écriait : « Qui me dénouera les bras ? qui me dénouera les cheveux ? Je me disloque dans des mouvements qui ne font que séparer davantage de ma tête la racine des cheveux ; la soif et la faim ne sont pas les causes principales qui m’empêchent de dormir. Il est impossible que mon existence enfonce son prolongement au delà des bornes d’une heure. Quelqu’un pour m’ouvrir la gorge, avec un caillou acéré ! »