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L’ÉCRIN DU RUBIS

puisque l’exemple m’en venait de ma mère. Dans ma pensée, je ne faisais qu’anticiper sur des jeux permis et ma faute m’en parut très allégée.

J’entraînai ma petite Alice à la partager ; et je l’y trouvai d’autant mieux disposée qu’elle n’était pas sans ressentir, ainsi qu’elle me le dit, un trouble agréable à se laisser déculotter par sa bonne quand il lui fallait prendre médecine. Il n’était pas de dimanche où profitant de notre journée de sortie, nous ne prissions ce divertissement dans quelque pièce isolée de ma maison ou de la sienne, au gré des visites que se faisaient nos mères très liées ensemble. Heureuses et pressées de se retrouver sans des témoins gênants pour leurs tendresses, elles se libéraient de notre présence en nous disant d’aller jouer. Des après-midi entières nous échappions ainsi à toute surveillance et retirées en sécurité, nous nous abandonnions sous couleur de jeux très innocents je ne dirai pas aux vices de notre âge, mais aux égarements d’un instinct qui balbutie encore.

Ce ne furent d’abord que des enfantillages. J’étais le docteur ou l’infirmière, Alice était la malade et j’ordonnais un lavement que j’administrais sur-le-champ. C’était le thème rituel qui ne variait guère. En réalité cela se bornait au simulacre. Mais dans l’innocence encore de notre pensée et des intentions que nous apportions à cet amusement que le précoce instinct de notre fonction maternelle généralise si tôt chez les petites filles, de