Page:Lauris - L’Écrin du rubis, 1932.djvu/65

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
63
L’ÉCRIN DU RUBIS

nœud du ruban qui retenait votre chemise brodée d’un feston ; un corset de coutil à fleurs brochées arrondissait vos hanches encore menues sous un pantalon de linon dont le volant plissé enserrait le genou de son engrelure. qui faisait chou sur le côté. J’étais très émue… Je me mis à la fenêtre où vous vîntes me rejoindre, silencieuse et toute nue sur le piédestal fuselé de vos bas noirs rubanés de mauve, hiératique sous la coulée de vif argent dont le rayon lunaire vous faisait un manteau… Votre bras s’enroula à ma taille flexible, et, per arnica silentia lunae, votre voix égrena sur ma bouche captive les tendresses suaves du poème de Verlaine :

Et toutes deux, avec des langueurs d’asphodèles,
Savouraient à longs traits l’émotion profonde
Du soir…

Puis, ayant tiré le rideau, vous m’avez fait asseoir à la toilette et pris la main dans votre main fiévreuse. Vos yeux allaient de mon regard inquiet à l’un de mes doigts dont le bel ongle lancéolé semblait, sous votre palper, offusquer vos obscurs desseins.

— Il faut ! avez vous dit en prenant vos ciseaux.

Nous étions assises face à face, mes genoux dans les vôtres. Vous étiez grave, Moi, je riais, car je croyais comprendre… Derrière nous, le vent de la mer faisait fluer mollement les longs rideaux de l’alcôve que ma pensée peuplait de doux pressentiments.