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L’ÉCRIN DU RUBIS

Nos cœurs battant d’un même souhait d’étreinte dont notre chasteté ignorait les moyens, doucement tu t’es agenouillée sur moi, nos robes emmêlées, posant sur mes lèvres ce que j’offrais aux tiennes.

Tandis que je polis en cet instant mes ongles, pourquoi donc subitement, Nelly, surgissez-vous des limbes du passé ? Par quel lien votre souvenir est-il lié à la toilette de ma main et quel reflet de mes sensations ou de mes pensées a soudain évoqué votre image ?… Oui, je me rappelle, Nelly, et je ne veux pas compter sur mes doigts, car il y a bien de cela vingt ans : vous en aviez seize et moi quinze. J’étais l’hôte de vos parents au bord de la mer. Ah ! certes si je me souviens ! Si bien que je crois sentir encore la pression de votre main emprisonnant ma main droite qui se débattait un peu devant le sacrifice que vous demandiez de ce qui était son orgueil.

C’était un soir dans votre chambre où nos deux lits se côtoyaient sous le baldaquin d’une indienne à fleurettes qui répandait son odeur fraîche. Nous étions à l’âge où tout est frisson, caresse, curiosité et un peu plus. Je suivais derrière vous dans la glace, les mouvements de vos bras relevés pour tordre votre chevelure au ton nuancé du miel, dont un ambre plus flavescent tachait le creux de votre aisselle. Votre épaule était nue sous le