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L’ÉCRIN DU RUBIS

Toute une saison de Carnaval passée ensemble à Venise, elle voulut me servir de femme de chambre, pour se repaître à son aise des délices de la suggestion érotique dont je lui étais l’occasion dans les divers moments de ma vie d’élégante. Elle m’habillait et me déshabillait, procédait à tous les soins de ma toilette : au lever elle me douchait, faisait les ongles de mes pieds, avivait de rose la fraise de mes seins et d’indigo les petites veines de la gorge. Elle me donnait les secrètes ablutions avec une dextérité qui m’en faisait une extrême douceur. Elle brossait et peignait ma brune toison, poudrait d’iris les chairs en contact, crayonnait de parfums divers fossettes et vallons, nattait mes opulents cheveux, et terminait par la main dont l’attouchement l’émouvait au suprême degré par tout ce que lui contaient, de leur air innocent, ces doigts fuselés, artisans des extases, ce médius d’un ongle arrondi au service des languides viduités, cette paume d’une peau si fine et souple qui sous sa manchette de dentelle, avait saisi et éprouvé la flèche de Cupidon.

J’étais ainsi pour Conchita l’instrument passif des jouissances que la subtilité de ses ardeurs tirait du seul exercice de son imagination. Pas une fois, elle n’en voulut rompre le charme en des privautés plus substan-