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L’ÉCRIN DU RUBIS

Elle n’en trouvait point d’égale dans le bonheur partagé. Tout ce que nous nous en promettons à l’avance, ces enchantements sans fin, ces lascivetés des sens, ces délices inouïes, tout cela se dissipait comme au réveil la brume d’un rêve, dès qu’elle était en possession d’en goûter l’ivresse dans la communion de la chair.

C’est que la longue habitude du plaisir de mollesse auquel elle avait glissé sur les alliciances de la délectation morose, ce plaisir que la crainte du péché lui avait fait longtemps goûter derrière l’écran de la robe, avait substitué chez Conchita, à la cause directe de l’émoi sensuel, tout l’ensemble des impressions dont l’enveloppe de ses élégances accompagnait sous sa main et sous ses yeux le sentiment de sa félicité. Une expérience répétée lui avait si étroitement associé dans une même perception son plaisir à la parure qui semblait en être la complice, et au langage mimique de ses membres à travers leurs voiles, qu’elle en était venue à ne se faire une volupté que du décor et des figures de Vénus.

Elle ne voyait plus dans le corps que l’accessoire du plaisir. Ce dont il se drape et à travers quoi le cherche le désir, tous les artifices par lesquels le génie de la Mode en stylise les lignes ; cet appareil de splendeurs d’étoffes et de couleurs où il s’enferme comme dans une châsse inviolable et sacrée, lui étaient une réalité plus vivante que le nu dans tout le rayonnement d’une beauté parfaite.