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L’ÉCRIN DU RUBIS

en devoir de se dévêtir de la tête aux pieds pour assortir, à son ordinaire, ses dessous au coquet tailleur émeraude choisi par elle pour cette promenade. Je l’avais suivie dans sa chambre. Devinant mon souhait et congédiant sa soubrette, elle s’était abandonnée à mes soins dans un long baiser, et je me donnai l’exquis régal de voir sortir de mes mains officieuses le marbre éclatant de sa nudité, tandis que chantait à mon oreille la délicieuse mélodie de ces vers de Renée Vivien :

Sous ta robe qui glisse en un frôlement d’aile,
Je devine ton corps, les lis ardents des seins,
L’or blême de l’aisselle,
Les flancs doux et fleuris, les jambes d’immortelles,
Le velouté du ventre et la rondeur des reins.

Dans le poudroiement de lumière de cette belle journée, le grand lit Louis XVI rechampi de blanc nous offrait sur sa courte-pointe de satin d’or et de guipure, le repos discret de son haut baldaquin de tentures de brocart sous des enveloppements de Malines. Nous nous y abîmâmes dans une douce félicité où nos sens s’aiguisaient sur la vision qu’une glace de Venise nous renvoyait de notre embrassement dont je puis dire, reprenant un mot de Lanoue, qu’il n’était pas coupable puisque de la terre nous avions monté jusques au ciel.

Sur le ravissement de sa chair étonnée mes lèvres tremblantes dispersèrent un essaim de baisers. Sous