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le poète

Tu pourrais les mettre à sécher près de la grange,
Où la génisse et la vache ne passent pas.
Il y a une corde en osier à des échalas.

la fiancée

Près de la grange, l’ombre est trop épaisse à cause du noyer.

l’âme du poète (au poète qu’elle a suivi.)

Ton cœur en ce moment est dans l’ombre du noyer.
Ton bonheur est comme le soleil qui glisse
sur le perron usé, les paules et les glycines
au bois tordu et dur. Là-bas, sur la haie,
séchaient-les bas légers de la fiancée,
et la vache qui passait les a manges,
parce qu’ils éclairaient le soleil comme l’herbe bleue,
parce que la vache était contente sous le ciel en feu,
parce que tout était bon, parce que tout était doux,
parce que tout était luisant comme le houx,
parce que la vie est comme l’eau qui coule
sur les cressons et les pierres dorées et douces.

le poète

Fiancée, donne-moi un verre d’eau ?

la mère (à la servante qui est entrée)

Va au puits chercher de l’eau. Ne cogne pas
à la pierre le seau usé, la cruche. Va.

Écoutez encore la complainte du petit veau :

Les pauvres donnent aux pauvres. Je ne sais pas
si les riches donnent jamais !… Le petit veau,