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systématique : vous verrez qu’il foisonne de mots soulignés, de mots en italique, de mots en majuscules énormes. Et pourquoi ? Vous n’arrivez pas à vous en rendre compte. Si vous interrogez l’auteur, il hausse les épaules en vous traitant d’imbécile, ou bien il vous répond simplement :

— Il faut que cela soit ainsi.

— Mais pourquoi tel mot souligné plutôt que tel autre ?

— Il le faut. L’esprit qui m’inspire seul le sait.

Et vous n’arriverez pas à en tirer autre chose.

Si on veut bien se reporter aux citations que j’ai faites précédemment, on verra combien ce fait est fréquent, aussi bien chez les décadents que chez les aliénés.

Ce n’est point tout encore. Les décadents aiment à entremêler leurs phrases, à les entrechoquer comme leurs idées. Ils recherchent les inversions hardies qui renversent le sens des choses exprimées. On ne peut plus les suivre dans leurs hyperboles et leurs métaphores, tant elles s’éloignent de l’idée qu’ils ont voulu rendre. On dirait un coup d’aile qui les enlève en pleine poésie, alors que ce n’est qu’un éblouissement sans vision nette, sans envolée large sur l’aile de l’idée.

Tous ces mêmes caractères vous les retrouverez dans les écrits des aliénés : même enchevê-