Page:Laurent - La Poésie décadente devant la science psychiatrique, 1897.djvu/134

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dextre levée dans un geste impérieux de commandement ; d’autres, les bras croisés, le front plissé par la colère ; d’autres, les yeux levés au ciel dans une envolée de prière ; tous enfin dans une pose étudiée, comme des acteurs au théâtre.

La même tendance se retrouve chez les décadents et chez tous les névrosés. Jules Barbey d’Aurevilly, un névrosé de génie, se revêtait, chez lui, tantôt d’un grand peignoir blanc, tantôt d’une blouse de drap rouge brodée de croix noires et vertes sur l’épaule ; il se coiffait d’un bonnet de drap rouge à forme dantesque.

Voici maintenant un numéro d’un journal qui contient toute une série de portraits des poetæ minores des diverses écoles décadentes. Si on supprimait les noms, si on se bornait à examiner le costume et les attitudes, cet album différerait bien peu de celui de Sainte-Anne. C’est la même recherche des poses, le même souci des attitudes. Notez encore l’usage fréquent du monocle, la disposition invraisemblable de la chevelure et quelquefois de la barbe, le soin excessif ou le négligé non moins excessif et prémédité de la coiffure. On sent que tous ces individus ont voulu se faire une tête, espérant, à défaut de talent, se signaler ainsi à l’attention de leurs contemporains. Voyez celui-ci dans une pose théâtrale, le chef ombragé d’une longue chevelure d’astre, sanglé dans une longue redingote à sous-pieds, avec une cravate aussi spacieuse qu’un