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Chats, le dédie, dans une « dédicace à prendre au sérieux », dit-il, « à Nini, la belle chatte blanche et gris-perle qui venait le réveiller tous les matins dans son petit lit d’enfant en lui apportant sa jolie tête à caresser ; à Nini la grande, la douce, l’intelligente, dont la figure, aujourd’hui lointaine, est encore dans son souvenir aussi vivante et radieuse qu’aux jours où sa mère en provoquant ses aimables coups de griffes, ne se lassait point de la lui faire admirer ». Il espère que « du haut de l’astre où maintenant elle réside (la lune sans doute) », elle ne désapprouvera pas trop ses modestes essais poétiques sur les chats.

Il est vrai qu’il reconnaît une foule de qualités à cet égoïste et hypocrite animal pour lequel il a une adoration morbide. Écoutez plutôt :

Le plus gras des matous fait sa digestion
Couché sur ses poignets comme un taureau dans l’herbe.

Son œil est demi-clos et jamais un lion
N’eut le sourcil chargé d’un ennui plus superbe.

On sent bien qu’un sultan si formidable à voir
N’a jamais à ses vœux rencontré de rebelles,
Et qu’il n’eut qu’à choisir pour jeter le mouchoir
Dans le troupeau soumis des chattes les plus belles.

Quels bâtards de ce tigre ont été reconnus ?
Aucun. Le hasard seul leur fournit la gamelle ;
Pourtant ces vagabonds, courant les toits pieds nus,
Doivent encore bénir la bonté paternelle.