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à ses côtés même, elle étudiait en secret son catéchisme et ses prières. Elle fut longtemps retenue et comme enchaînée par une participation à des actes idolâtriques ou superstitieux, que le malheur des temps et sa situation lui rendaient presque inévitables. Quand elle eut rompu tous ces liens et qu’elle se sentit libre, elle demanda avec instance la grâce de la régénération. Mgr Mutel eut la joie de la baptiser et lui administra la confirmation en octobre 1896. Un peu plus tard, il la revit encore pour entendre sa confession et lui donner la sainte communion. Ce devait être sur la terre leur dernière entrevue. Quelques mois plus tard, elle tomba malade pour ne plus se relever. Le secret profond qui planait sur sa conversion ne permit pas qu’on lui portât le secours des derniers sacrements ; mais jusqu’à la fin elle fut assistée par une des femmes de chambre chrétienne, qui se servait pour l’exhorter de paroles et de signes de convention dont l’entourage païen ne pouvait percer le mystère. La princesse Marie s’endormit dans la paix du Seigneur, le 8 janvier 1898, à dix heures du soir ; elle était dans la quatre-vingtième année de son âge.

Cette même année 1898 apporta à la mission de Corée une grande joie : le 29 mai, fut consacrée la cathédrale de Séoul, dont les superbes flèches disent au loin que l’époque des catacombes et des grandes persécutions est finie, et que l’ère de la liberté a commencé.

À cette cérémonie l’assistance dépassait trois mille personnes. Aux premiers rangs, tous les représentants de France, Russie, Angleterre, Allemagne, États-Unis, Japon et Chine, ainsi que les principaux résidents européens, les membres du gouvernement coréen et tous les liants fonctionnaires avaient été invités. La plupart avaient gracieusement accepté. Il y avait le président du conseil, plusieurs ministres et personnages de la plus haute noblesse, l’élite certainement de toute la Corée. Il n’est pas jusqu’à cet ancien ministre des affaires étrangères, lequel avait autrefois si âprement disputé à la mission le terrain où est bâtie l’église, qui ne soit venu faire joyeuse amende honorable de ses tracasseries d’antan.