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LE CŒUR DU POÈTE.

LE CŒUR DU POÈTE. avec empressement, remercia d’un coup d’œil le comte de B…, et prenant le bras de l’ex-conventionnel, if le conduisit à travers de nombreux salons jusqu’à un boudoir reculé, devant un divan d’étoffe écarlate où reposait, couchée plutôt qu’assise, une femme demi-nue à la manière des courtisanes grecques. Stéphanie était née orpheline au milieu de parens que l’émigration avait dispersés. Demeurée seule en Vendée avec un vieux garde-chasse qui flattait ses goûts, elle avait pris à quatorze ans l’habitude des’abandonner sans contradiction aux inspirations premières d’un caractère aventureux et passionné. A quatorze ans elle s’était rappelée un de ses jeunes cousins, que, suivant une coutume assez peu réfléchie dans les grandes familles, on lui donnait pour maridans leur double enfance. Il servait dans l’armée de Delbée. Stéphanie n’imagina rien de plus naturel et de plus simple que de monter, par une belle nuit de mai, sur un cheval de laboureur, et, suivie de son goutteux écuyer, d’aller rejoindre le chevalier qui lui était destiné pour époux. L’armée catholique et royale parut enchantée de la nouvelle recrue. La bonne grace de l’amazone fut cependant bientôt cachée sous l’uniforme vert, l’écharpe blanche ; et puis la ti3000 Digitized

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