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avait six poches qui recevaient tout cela, lorsque je me présentais à une maison respectable, de sorte que rien ne parraissait : comme sur le chemin c’eût été incommode, je mettais les trois paquets dans un mouchoir et les portais en sautoir au bout de mon bâton à épée, sur lequel j’avais mis un parapluie, qui excitait partout la curiosité et faisait rire les filles, je ne sais pourquoi. Les autres poches de mon habit étaient pour les lettres, le porte-feuille et l’usage ordinaire.

Les personnes chez qui j’étais reçu, et dont je refusais toujours les offres de Linge, étaient fort étonnées de me voir revenir dans le sallon avec des bas soye blancs, de la poudre &c. comme si j’eusse voyagé avec un bagage considérable, fort à mon aise dans une bonne voiture.

En bien, mon cher Monsieur Sterne, que penséz vous de l’état de la garderobe avec laquelle j’ai voyagé six grands mois et été admis dans les maisons les plus respectables ? mon porte-manteau vaut bien le vôtre, je crois.

Castle Connell est un endroit charmant, situé sur le bord du Shannon, qui coule dans cet endroit comme un torrent, au milieu des pierres et des rochers ; les eaux minéralles et la beauté du lieu y attirent un grand nombre d’oisifs de Limerick, qui viennent passer l’été dans le village et chaque matin vont boire un verre d’eau. Les riches étrangers qui s’y rendent y attirent aussi un nombre assez considérable de mendiants, qui sont encore plus nombreux dans cette partie que dans le reste de l’Irlande. C’est une remarque assez singuliere, cependant tres juste ; plus le pays est riche en Irlande, plus le peuple est pauvre, et moindre est le prix des