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pente plusieurs arcs-boutans, les galeries, terrasses, et reconstruire la grande voûte de la croisée qui menaçait ruine.

En 1741, les vitraux peints des fenêtres de la nef, qui représentaient des évêques et personnages de l’ancien testament, furent détruits. En 1753, on enleva également ceux du sanctuaire qui représentaient le Christ entre la Vierge et saint Jean-Baptiste.

Le chapitre de Notre-Dame fit briser ces verrières, dont le père Dubreul parle comme d’une merveille ; ce fut un certain Le Viel, maître-vitrier, fort versé dans la théorie de la peinture sur verre, auteur d’un Traité pratique et historique sur cet art[1], qui fut chargé de remplacer cette magnifique décoration par des verres blancs, entourés de bordures fleurdelisées. Nous ne savons si le sieur Le Viel comprenait ainsi la partie pratique et historique de son art ; mais ce qu’il y a de curieux, c’est que ce malheureux ouvrier fut tellement satisfait de son œuvre de destruction, qu’il peignit sur l’une des verrières une longue inscription latine, dans laquelle il dit pompeusement que les vitraux ont été refaits en verres blancs de France, et les bordures en verres bleus de Bohême ; il termine ainsi : « Le tout fait et peint par Pierre et Jean Le Viel frères, maîtres-vitriers à Paris. »

Nous ne comprenons pas ce que le mot peint peut avoir à faire ici. Cet acte de barbarie fut malheureusement répété bien des fois, à cette époque, dans nos cathédrales. Les chapitres voulurent trouver leurs églises trop sombres ; à Chartres, à Paris, à Reims, et dans cent autres édifices, les verres blancs remplacèrent les verrières peintes, et le badigeonnage acheva d’enlever à nos temples leur mystérieuse obscurité. Mais, à Notre-Dame, on ne se contenta pas de briser les vitraux ; les meneaux des grandes croisées furent encore recoupés, retaillés de la façon la plus déplorable, sans doute pour donner plus d’éclat et de développement aux nouveaux vitraux peints des sieurs Leviel.

  1. Curiosités de l’église de Paris, par M. C. P. G. 1763.